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4 avril 2024 4 04 /04 /avril /2024 10:48

Bonjour les amis,

Afin d'y voir un peu plus clair dans cet authentique sac de noeuds qu'est le conflit israélo-palestinien j'ai entrepris hier soir la lecture du dernier livre de Gilles Kepel intitulé HOLOCAUSTES.

Israël-Palestine: l'inquiétante revanche démographique des intégristes religieux...

Voici la présentation de l'éditeur.

La razzia qui a dévasté, le 7 octobre 2023, l’État juif où 1 140 personnes ont été massacrées, violées, mutilées a été suivie d’une hécatombe lors de l’assaut sur Gaza en représailles, dans lequel ont péri plus de 25 000 Palestiniens.
Ces holocaustes – au sens religieux originel de sacrifices de masse – incarnent la malédiction de la Terre sainte dans notre période tragique. Engrenage de violence et d’aveuglement dont les logiques remontent loin dans l’histoire des deux peuples.
Gilles Kepel montre comment les protagonistes de ce drame entremêlent, dans leurs actes et discours, mystique et politique. À l’islamisme radical du Hamas sunnite et de ses alliés chiites inspirés par l’Iran s’opposent les suprémacistes juifs qui assurent la survie d’un gouvernement Netanyahou aux stratégies ambiguës. Du Yémen au Liban, ce choc exacerbe les tensions régionales et connaît des répercussions mondiales. Il prend l’allure d’une guerre planétaire contre l’Occident et ses valeurs, opposant Apartheid et Shoah. En s’appropriant la notion de « génocide », certains États et organisations se réclament d’un « Sud Global » en lutte contre un « Nord » stigmatisé comme colonialiste et « islamophobe ».
L’auteur révèle ici les enjeux majeurs de ce conflit de civilisations.

J'ai commencé la lecture du livre et, d'entrée de jeu, Gilles Kepel nous explique de manière très didactique et avec précision, en faisant les rappels historiques nécessaires, les liens et divers intérêts pour le moins compliqués et contradictoires de tous les acteurs qui gravitent au Moyen-Orient autour de la cause palestinienne.

C'est extrêmement compliqué (euphémisme) et Kepel arrive à éclairer la lanterne du parfait ignare que je suis sur ce sujet. Qu'il en soit remercié.

Il expose également les conditions qui ont permis à Yahya Sinwar de tromper les services israéliens au sujet des pogroms du 7 octobre.

Au début du livre l'auteur explique que tant au Liban comme en Israël, le poids politique des "intégristes" ne fait qu'augmenter pour des motifs purement démographiques:

Commençons par Israël avec deux  extraits:

" La pression qu’exercent les partis religieux sur le système électoral israélien n’est pas si éloignée de celle de l’islam politique dans les pays musulmans avoisinants, même si les modalités varient selon qu’ils sont gouvernés par un régime autoritaire – comme c’est le cas pour les États arabes – ou démocratique illibéral, à l’instar de la Turquie. Dans tous les cas, le différentiel du taux de fécondité entre les milieux traditionnels et modernes s’est traduit en une à deux générations par l’érosion démographique des classes moyennes laïques, et la montée en puissance des enfants de familles nombreuses issues de l’exode rural qui se sont installées dans les périphéries urbaines, y apportant leur ethos conservateur aisément capté par les activistes rigoristes."

"En Israël, le même souci de fécondité veut que les cinq épouses des dirigeants des partis religieux de la coalition victorieuse lors des élections du 1er novembre 2022 aient mis au monde pas moins de 42 enfants ! La palme dans ce domaine revient aux haredim (ultra-orthodoxes) : ils représentent, en 2020, 20 % de la population juive , et devraient atteindre35 % en 2040, ceteris paribus..."

Continuons avec le Liban:

"Au Liban, la surnatalité des chiites pauvres, marginalisés lorsque fut établi le Pacte national libanais en 1943, partageant le pouvoir entre les classes moyennes urbaines chrétiennes et sunnites, s’est traduite désormais par la prise de contrôle de l’État par le Hezbollah – dûment aidé à cette fin par Téhéran. La Dahiyé – banlieue informelle du sud de Beyrouth où se concentrent les néocitadins chiites chassés des campagnes méridionales par la misère et les bombardements israéliens – est aujourd’hui la véritable capitale du pays, au détriment du grand sérail où siège le Premier ministre sunnite ou du palais de Ba’abda où réside le président maronite de la République. C’est depuis ce bastion que s’exprime le cheikh Nasrallah, porte-parole principal de « l’axe de la Résistance » – lors de ses discours des 3 novembre 2023 et 3 janvier 2024...."

 

 

Ces considérations purement démographiques nous montrent que, électoralement parlant, les "intégristes" de part et d'autre gagnent la partie sur le court, moyen et long terme.

Les progressistes, ceux qui n'ont pas une vision excluante et qui sont à la recherche de formes de cohabitations pacifiques, ne font pas d'enfants et donc subissent une lente mais sûre érosion électorale.

Netanyahou base sa politique sur les exigences des ultra-orthodoxes qui, à l'avenir, vont gagner de plus en plus de poids.

Nous voilà donc plongés dans une bataille de "faucons" contre "faucons".

Bref, la démographie n'aide absolument pas et on s'oriente vers tout sauf vers des conditions d'une paix durable...Plus la laïcité perd de terrain, plus la guerre en gagne...

PS: Je n'en suis qu'à la moitié du livre et je ne sais pas encore quelles sont toutes les conclusions de Kepel mais son chapitre concernant la démographie m'a paru terriblement "conditionnant" par rapport à l'avenir.

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commentaires

R
Tout cela est inquiétant... Des humanitaires ont été ciblés et tués par l'armée israélienne, un comble ! Le fondateur de l'ONG World Central Kitchen accuse Israël d'avoir ciblé ses employés... c'est très grave.<br /> <br /> <br /> https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/journal-de-18h/journal-de-18h-emission-du-jeudi-04-avril-2024-5222681<br /> <br /> <br /> La démographie est aussi une arme de guerre :<br /> <br /> <br /> http://rosemar.over-blog.com/2023/11/huit-enfants-par-femme-russe-tel-est-le-souhait-de-vladimir-poutine.html<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Belle soirée, AJE
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A
Le livre de Kepel m'a mis le doigt sur un problème auquel je n'avais pas pensé. Israël est une démocratie mais les taux de fécondité très différenciés entre les progressistes modérés et les intégristes ont déjà inversé les plateaux de la balance dans le mauvais sens, et ça ne fera qu'empirer. Cela est de très mauvais augure car c'est l'appui des ultras qui permet à Netanyahou de maintenir sa stratégie criminelle.<br /> Merci pour les liens. L'affaire de l'ONG bombardée fait grand bruit en Espagne car le fondateur de l'organisation américaine, le chef cuisinier José Andrés, est espagnol. Le chef du gouvernement espagnol Pedro Sanchez a déclaré que les explications reçues de la part du gouvernement israélien sont inacceptables.<br /> <br /> https://www.eldiario.es/politica/sanchez-califica-inaceptables-explicaciones-israel-muerte-cooperantes-jose-andres_1_11260800.html<br /> <br /> Par ailleurs l'Espagne va reconnaître l'Etat palestinien avant l'été.<br /> <br /> La démographie comme arme de guerre ça ne marche pas chez Poutine mais du côté des intégristes ça fonctionne du feu de Dieu !<br /> 5 femmes de ministres ultraorthodoxes qui ont eu 42 enfants !!! Qui dit mieux? Le ton est donné.<br /> <br /> Quant au livre de Kepel que je n'ai pas encore terminé il est tout simplement magistral. Il apporte énormement d'informations et d'enseignements qu'il sait parfaitement mettre en perpective.<br /> Bonne fin de soirée l'amie
C
Un article qui devrait vous intéresser aussi :<br /> <br /> <br /> "CRITIQUER L'INCOMPÉTENCE DU GOUVERNEMENT ISRAÉLIEN N'EST PAS ANTISÉMITE<br /> La stratégie israélienne actuelle aboutira à un bourbier contre-insurrectionnel de type irakien.<br /> Par Ivan Eland<br /> <br /> Traditionnellement, les partisans de la ligne dure affirment de manière absurde que toutes les critiques de la politique israélienne au Moyen-Orient, ou la plupart d'entre elles, sont antisémites, une accusation ignoble destinée à protéger le gouvernement israélien de toute critique. Pourtant, même les gouvernements démocratiques - parce qu'ils dépensent l'argent des contribuables et semblent souvent se désintéresser de la vie des étrangers non électeurs (et parfois même des électeurs) - sont souvent incités à prendre des mesures qui posent des problèmes moraux et financiers. Dans la guerre de Gaza, le gouvernement israélien prend des décisions coûteuses en termes de vies et d'argent ; il prend donc des mesures qui risquent de nuire à la sécurité et à la prospérité de son propre peuple. Est-il antisémite de mettre en garde contre de telles actions ? La réponse semble être non.<br /> <br /> La principale définition d'un sémite dans le dictionnaire est une personne qui parle l'une des langues sémitiques, par exemple l'arabe, l'araméen, l'assyrien, l'hébreu ou d'autres langues cananéennes. L'utilisation courante du terme "antisémite" signifie que l'on a des préjugés contre les Juifs. Pourtant, le judaïsme est une religion qui compte des adeptes dans le monde entier ; le sionisme est un mouvement politique qui soutient la création et le maintien de l'État d'Israël en Palestine ; et Israël est un pays composé à 80 % de Juifs et à 20 % d'Arabes. Toutefois, lorsqu'il est question de politique publique, le terme "Israël" fait généralement référence au gouvernement israélien. Enfin, plus de Juifs vivent en dehors d'Israël qu'en son sein, et certains membres de la diaspora ne soutiennent pas le sionisme. Il est donc absurde d'assimiler toute critique du gouvernement israélien à une atteinte à la religion juive ou aux Juifs, quel que soit l'endroit où ils vivent.<br /> <br /> En fait, récemment, certains hommes politiques et personnalités juifs des médias américains ont critiqué les actions du gouvernement israélien dans la guerre de Gaza - par exemple, le leader de la majorité sénatoriale Chuck Schumer, normalement pro-israélien, le sénateur Bernie Sanders et Peter Beinart, professeur et rédacteur en chef de Jewish Currents. Dans un récent article d'opinion paru dans le New York Times, M. Beinart a indiqué qu'en 2002, les démocrates soutenaient Israël plutôt que les Palestiniens par 34 points de pourcentage, mais qu'au début de 2023, la situation s'était inversée, le support aux Palestiniens devançant de 11 points ; en novembre 2023, chez les démocrates de moins de 35 ans, les Palestiniens devançaient de 58 points. <br /> <br /> Malheureusement, une partie de cette évolution de la critique publique légitime du gouvernement israélien s'est traduite par des actions antisémites illégitimes sur les campus universitaires. Beinart fait remarquer que ce détournement injustifié de l'hostilité à l'égard d'acteurs extérieurs vers des citoyens américains perçus comme étant liés à ces entités étrangères est une tradition américaine peu glorieuse - par exemple, l'hostilité à l'égard des Américains d'origine allemande pendant la Première Guerre mondiale, la violence à l'égard des musulmans américains après les attentats du 11 septembre et les agressions contre les Américains d'origine asiatique pendant la pandémie de grippe aviaire. Beinart a également cité les recherches du politologue Ayal Feinberg, qui a découvert que les incidents antisémites aux États-Unis augmentent lorsque le gouvernement israélien entreprend des actions militaires majeures. Cette découverte est d'autant plus ironique que le gouvernement israélien prétend protéger les Juifs du monde entier. <br /> <br /> Il est également ironique qu'un combat de boules puantes impliquant la droite critiquant la gauche pour l'antisémitisme sur les campus universitaires ait éclaté au moment où le gentil Donald Trump, ancien président et candidat à l'élection présidentielle de 2024, a été critiqué par de nombreux Juifs pour sa tentative de définir ce qu'est un bon Juif, en disant que les Juifs qui votent démocrate haïssent Israël et leur propre religion.<br /> <br /> Il n'est pas antisémite de critiquer le gouvernement israélien pour son apathie alors qu'il avait été averti un an à l’avance d'un projet d'attaque du Hamas ; pour avoir dit au Qatar de continuer à financer le Hamas trois semaines avant l'attaque afin d'empêcher l'unité palestinienne et une solution à deux États ; et pour être tombé dans le piège du Hamas en menant une réponse militaire démesurée à l'attaque terroriste odieuse du groupe le 7 octobre, soulevant ainsi une condamnation internationale écrasante de l'assassinat par le gouvernement israélien de plus de 31 000 habitants de Gaza à ce jour, avec la perspective que des dizaines de milliers d'autres meurent de famine.<br /> <br /> En vertu du droit international, les crimes de guerre ne sont pas justifiés en réponse à des crimes de guerre. Certains commentateurs affirment qu'Israël est soumis à des normes plus strictes que celles qui s'appliquent à la conduite d'autres guerres civiles plus sanglantes, comme celle du Soudan, et que ce double standard équivaut à de l'antisémitisme. Mais Israël est une démocratie développée et un allié des États-Unis ; le Soudan n'est rien de tout cela.<br /> <br /> Le commentateur américain David Brooks a récemment énuméré plusieurs options en lieu et place de l'invasion massive du gouvernement israélien et de l'écrasement de Gaza depuis les airs en utilisant d'énormes bombes dans les zones urbaines : 1) combattre le Hamas avec une stratégie plus légère et plus chirurgicale, 2) procéder à des assassinats ciblés des dirigeants du Hamas (stratégie antiterroriste), ou 3) mener une stratégie contre-insurrectionnelle à long terme. Il a estimé que toutes ces options étaient insuffisantes et a affirmé que le seul moyen de parvenir à la paix était de vaincre complètement le Hamas en poursuivant le pilonnage de Gaza par le gouvernement israélien pour le réduire en poussière.<br /> <br /> Pourtant, dès le début, la plupart des analystes militaires, dont peu sont probablement de véritables antisémites, ont pensé que l'élimination du Hamas était une chimère israélienne. Outre le fait qu'il a largement sous-estimé la menace que représentait le Hamas et qu'il a approuvé la poursuite du financement extérieur du groupe par le Qatar avant l'attaque, le gouvernement israélien n'a pas tenu compte des exhortations du président Joe Biden à ne pas commettre les mêmes erreurs de réaction excessive que les États-Unis après le 11 septembre. Le gouvernement israélien n'a pas écouté. Au lieu d'utiliser la riposte plus rationnelle consistant à cibler chirurgicalement les dirigeants du Hamas au fil du temps, il s’est immédiatement acharné sur Gaza, tuant et affamant des civils, et incitant les générations futures à rejoindre des groupes qui deviendront probablement le Hamas sous stéroïdes. <br /> <br /> Même une réponse plus ciblée aurait dû être une mesure provisoire jusqu'à ce qu'une solution de paix à un ou deux États puisse être trouvée, car les experts savent qu'on ne peut pas tuer pour se débarrasser d'une insurrection. Au contraire, pour éliminer l'insurrection, il faut supprimer la cause sous-jacente. Même si le gouvernement israélien réduit le reste de Gaza en ruines, il est assuré d'être pris dans un bourbier contre-insurrectionnel pendant de nombreuses années, semblable à celui qu'ont connu les États-Unis en Irak."<br /> <br /> https://www.theamericanconservative.com/criticizing-the-israeli-governments-incompetence-is-not-antisemitic/
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A
Merci Caius pour cet article très pertinent, frappé au coin du bon sens.<br /> L'opinion américaine, y compris celle de la population juive américaine, se désolidarise de plus en plus de la guerre menée par Netanyahou, une guerre condamnée par l'ONU qui suppose une quantité insensée de victimes civiles innocentes...mais en plus une guerre qui, mis à part son immoralité, n'aboutit à aucune solution durable, une guerre qui ne prépare aucun avenir crédible pour les palestiniens...c'est de la folie.<br /> La guerre est souvent pensée par ceux qui la lancent comme un prélude à un règlement politique, sauf qu'ici, politiquement parlant on ne voit rien.