Bonjour les amis,
Suite à mon article d' hier j' ai reçu une longue réponse de mon ami patron d' une PME travaillant pour plus de 90% à l' exportation dans un domaine assez pointu et concurrencé.
Je vous livre donc sa réponse, et vous pouvez bien évidemment en commenter le contenu et
je vous incite même à le faire, histoire d' enrichir le débat.
Simplement je ne répondrai pas aux com' s car je ne peux pas quand même pas le faire à sa place...
Voici donc sa réponse ( j' ai simplement enlevé certains noms précis par discrétion pour les intéressés):
Me revoilà l' ami.
Je viens de me mettre à jour avec la lecture de l’article sur le « décrochage de la France » et les échanges que vous avez eu sur ce sujet.
Je ne revendique pas non plus de mon côté une véritable expertise économique. Simplement quelques convictions (fortes !) liées à l’observation du fonctionnement économique de la planète et de son évolution sur plus de 30 ans de vie professionnelle, en particulier en tant qu’entrepreneur depuis près de 10 ans, qui plus est pour une entreprise dont la survie ne dépend que de son positionnement à l’international.
En ce qui concerne les écarts constatés avec l’Allemagne, Je pense qu’il faut effectivement distinguer les causes majeures et les éléments aggravants, comme le souligne assez bien l’article de JF Pelletier. C’est cette distinction qui fait souvent défaut dans les débats (cf vos échanges avec Rosemar)
Le goût pour l’innovation et la présence à l’international font partie des causes majeures. JF Pelletier développe assez bien ce phénomène avec notamment une présence d‘experts allemands dans tous les domaines auprès des pays en développement, expertise qui ouvrira forcément les portes aux entreprises qui vont ensuite exporter. Nous les avons aussi ces experts en France. Pourquoi ne sont-ils pas sur ce marché. Pas plus tard que le mois dernier, j’ai échangé avec X. Il est professeur chercheur à l’université de Y dans le domaine de l’urbanisme. Il dirige une équipe de plus de 20 personnes (enseignants et élèves chercheurs). Je ne doute pas qu’on ce genre de département existe dans plusieurs universités françaises et donc au bout du compte, ça fait un paquet d’experts qui cherchent dans un domaine finalement assez spécifique . Mais à la question qui m’est venue rapidement de savoir à qui profitait tout ce travail (couteux !), j’ai eu une réponse assez vague qui m’a laissé un peu sur ma faim. Or, on pourrait penser que ces questions d’urbanisme ont un caractère universel pour lequel ce genre d’expertise est exportable, non ? choix politique possible , non ?
Dans les causes ,sinon mineures, mais en tout cas plus secondaires, on va effectivement trouver les écarts de compétitivité mainte fois commentés (charges sociales, cout main d’œuvre , etc…) sur lesquelles je ne reviendrai pas. On peut également mettre dans cette catégorie les incitations qui sont également dans les mains du monde politique et du pouvoir de l’état, à travers divers forme d’aide et de loi.
Incitation à la recherche, à l’exportation. Loi en faveur de la participation des salariés aux résultats de l’entreprise ou de leur contribution à l’innovation comme mentionné dans l’article.
On voit bien que dans les 2 catégories, le rôle des politiques et les options prises sur le long terme sont importants. Ils ont là un vrai pouvoir d’agir sur l’avenir d’un pays. Il faut juste , comme souvent dans ces cas-là, une vraie vision , un courage politique et ….une certaine distance par rapport aux préoccupations électorales qui nous pourrissent , en France en particulier, la vie au quotidien.
Mais en dehors de ces éléments d’ordre politique, il ne faut pas exonérer le chef d’entreprise de ses propres responsabilités :
· Il a le devoir de donner à la recherche et l’innovation la place qui leur revient, même si il juge les aides de l’état insuffisantes.
· Il a le pouvoir de récompenser significativement les employés qui trouvent et innovent.
· Il a le pouvoir de faire profiter le personnel de la réussite de l’entreprise si celle-ci est au RDV.
Ces points sont trop souvent considérés comme optionnels en France par les chefs d’entreprise alors qu’il s’agit là de leviers majeurs dans le développement et la pérennité de notre économie.
L’innovation, subventionnée ou pas, est très souvent récompensées par un succès sur les marchés , j’ai des exemples personnels. La participation financière du personnel au succès de l’entreprise est immédiatement récompensés par une meilleure productivité et l’adhésion au projet global du chef d’entreprise et , là aussi, j’ai des exemples personnels.
Je terminerai sur un exemple précis pour illustrer à la fois le pouvoir respectif du chef d’entreprise et le rôle de l’état pour infléchir significativement la tendance dans un des domaines cités.
Je crois que c’est De Gaulle (Charles de son prénom) qui avait instauré sous forme de loi la « participation financière des salariés » aux résultats de l’entreprise. Il s’agissait, par un calcul assez compliqué déjà à l’époque, de redistribuer une partie des bénéfices de l’entreprise aux salariés. Bien entendu, le système a été décrié en son temps par la majorité des entreprises avec le soucis de trouver rapidement des parades pour minimiser les effets de cette loi « anticapitaliste ».
Depuis, le système a fait son chemin et les entrepreneurs les plus lucides ont vite compris le caractère motivant que pouvait avoir ce dispositif de complément de salaire. Sans entrer dans le détail des modalités de calcul, disons simplement qu’il permettait de distribuer 100 dans les poches du salarié pour un cout de 100 pour l’entreprise. En gros, pas de charges sociales et pas d’impôts pour cette « cerise sur le gâteau » qui pouvait prendre des proportions plus que significatives. Pour mémoire, je rappelle ici que , en ce qui concerne les salaires nous étions dans les années 70 à une dépense de 125 pour l’entreprise pour un net de 90 pour les employés (avant impôts) et que nous sommes aujourd’hui dans un rapport affolant de 145 / 78 !!!!.
Plus que jamais, « la participation » s’avére donc être un outil particulièrement intéressant qui combine la volonté du chef d’entreprise et une démarche incitative de l’état. Je l’ai moi-même développé à plusieurs reprises, y compris évidemment chez PMX où j’ai certaines années distribué des sommes plus que significatives qui ont évidemment produit leur effet motivant au fil du temps.
Seulement voilà, c’était trop beau et l’état, dans sa quête d’argent « au plus simple » a progressivement rogné sur cet avantage qui profitait à tous et à l’économie en général et nous sommes maintenant dans un rapport 120 / 90 (au lieu des 100 / 100 d’origine) pour cette forme d’intéressement. Nous nous rapprochons donc progressivement du système en place pour les salaires jusqu’à tuer très probablement à terme cet belle idée de participation .
J’aime bien cet exemple qui résume assez bien le rôle amplificateur que peut avoir l’état à partir du moment où la volonté d’entreprendre est là …où l’inverse .
La poule et l’œuf …on n’en sort pas finalement
Voilà donc ma contribution du jour.
A bientôt l’ami et au plaisir de te lire