Publié le 16 Février 2019

Bonjour les amis,

Je viens de terminer SEROTONINE, le dernier ouvrage de Michel Houellebecq que j'ai beaucoup aimé, même s'il se termine d'une manière plus amère que je ne l'espérais.

Alors pour vous présenter ce livre,  je vous renvoie à l'excellent article que Rosemar lui a consacré et, comme d' habitude, j'y ajouterai quelques commentaires personnels.

Tout d'abord parlons du style. Il me semble que Houellebecq a un peu changé son écriture et qu'il se lance souvent dans de très longues phrases qui rebondissent , virgules après virgules, tout comme la pensée de Florent qui se projette souvent assez loin dans le futur, et qui écarte, les unes après les autres, les fausses solutions qui se présentent à lui.

Le début du roman mêle drôlerie et dérision à une situation du narrateur qui est quand même assez glauque. Le rire est parfois salutaire : rions de notre misère pour ne pas en pleurer...Certains portraits de femmes sont tout simplement savoureux, notamment celui de Yuzu, la maîtresse japonaise. Il m'est souvent arrivé de pouffer de rire dans la première partie du roman.

Houellebecq change souvent de registre. Il peut commencer sur un ton badin et provocateur et d'un seul coup, nous balancer sans prévenir des passages très bien écrits, très pensés, d'une grande profondeur sur la nature de l'amour et de nos relations avec les femmes.

Quand il parle de "chattes" et de " bites" ce n' est jamais vulgaire et c'est toujours assez jubilatoire. Il sait nous toucher au plus profond de nos moteurs charnels.

Houellebecq joue la provo aussi, et beaucoup de ses affirmations péremptoires sont à prendre au second degré...Souvent, elles reflètent juste un fond de vérité. Seul lui peut se permettre d'écrire certaines phrases  politiquement très incorrectes en apparence.

Mais ce qui frappe le plus dans ce roman c'est l'enfermement du héros, qui prévoit et anticipe les futurs échecs qui l'attendent et qui préfère prendre la juste mesure de ses erreurs passées, qui sont en définitive assez irréparables.

Ce livre est aussi une réflexion sur notre liberté qui, lorsqu'elle se préoccupe trop de celle des autres, finit par nous projetter dans une solitude mortifère. L' isolement devient le prix de notre liberté, le lourd tribu que nous lui payons.

Le héros a besoin des femmes mais il ne tente jamais de tricher, ni de se les approprier de manière déloyale ou peu respectueuse de leur liberté. D'ailleurs, il n'applique pas à lui-même certains conseils qu'il donne à ses amis qui sont dans un état de dépression proche du sien. J' ai lu ici ou là que Houellebecq était  parfois mysogine : rien n' est plus faux. Au contraire, la femme et son sexe représentent pour lui la naissance du monde.

Le fond du roman est très noir car Florent se sent incapable de survivre sans l'aide de ses petites capsules de captorix ( un nouveau médicament mis sur le marché qui altère sa libido). 

Florent, frappé par l'état de notre monde et de nos relations sociales perverties par la marchandisation qui crée de nouvelles castes (voire de nouvelles aristocraties), ne peut y survivre que par des moyens artificiels.

Quand j'ai refermé la dernière page je me suis senti assez bouleversé, profondément remué par tant de lucidité sur notre condition humaine au XXI ème siècle.

Stressés, frustrés et isolés que nous sommes, avec le bonheur qui nous glisse irrémédiablement entre les doigts.

 

Sérotonine...ou quand la solitude et la dépression vous attendent au bout du chemin.

PS: En marge de ce roman, sa lecture m'a rappelé une info que j' ai lu récemment et qui m' a " frappé" comme aurait dit Coluche : Theresa May a créé un "ministère de la solitude" tant ce problème s'est converti en un fléau social au Royaume-Uni.

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Rédigé par alea-jacta-est

Publié dans #Roman, #Litterature, #Solitude, #Amour, #Liberté

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Publié le 12 Février 2019

Bonjour les amis,

La semaine dernière notre directrice de chant nous a remis entre les mains une partition que je ne connaissais pas du tout, et en jetant un premier coup d'oeil sur les paroles je suis tombé sur cette phrase:

" Canta y no llores" qui veut dire " Chante et ne pleure pas", et j'ai tout de suite pensé à une chanson bien connue des mariachis intitulée "Cielito lindo" et que voici.

NB: Vous y entendrez le "ay ay ay ay canta y no llores"  à 55 secondes.

 

Mais en regardant de plus près la partition que nous avait tendue notre directrice, il était évident que le thème musical n'avait rien à voir avec la célèbre chanson des mariachis.

Non, il s'agissait d'une Habanera tirée d'une Zarzuela de Manuel Penella intitulée " Don Gil de Alacalá".

A noter que Penella était un compositeur né en 1880 dans ma région de Valencia dans le sud-est de l'Espagne.

Don Gil de Alacalá est un opéra comique en 3 actes qui a été interprété pour la première fois en 1932 au théâtre des nouveautés de Barcelone.

Voici le lien youtube de cette habanera avec les paroles originales qui accompagnent ci-dessous. Le choeur intervient à partir de 2 minutes.

TODAS LAS MAÑANITAS ( paroles de M. Penella)
Todas las mañanitas
vuelve la aurora
y se lleva la noche
triste y traidora.
 
Otra vez vuelve al alma
del sol la alegría
y es su luz la esperanza
de un nuevo día.
 
Canta y no llores,
corazón, no llores, ¡ay!,
que la esperanza
será la aurora
de tus amores, ¡Ay!,
 
Canta y no llores,
corazón, no llores, ¡ay!,
volverá la aurora
y tu noche triste
se llevará.
 
CHOEUR
Canta y no llores,
corazón, no llores, ¡ay!,
que la esperanza
será la aurora
de tus amores, ¡ay!
 
Canta y no llores,
corazón, no llores, ¡ay!,
volverá la aurora
y tu noche triste
se llevará.

On reconnaît tout se suite, dès les premières mesures, le balancement caractéristique des habaneras qui sont un style musical né au XIX ème siècle, originaire à la fois de Cuba mais aussi de Catalogne.

Alors, nous, on n'aura bien évidemment pas les moyens d'engager un orchestre symphonique et nous serons accompagnés par une pianiste, mais pas n'importe quelle pianiste ! Ce sera Leillani, notre accompagnatrice cubaine !

Et, comme vous pouvez l'imaginer, la habanera fait partie de son ADN.

Donc notre version ressemblera plutôt à ceci.

En fait, nous on chantera cette habanera probablement sans solistes, donc notre interprétation ressemblera plutôt à ça...

Enfin, et en hommage à l'immense Monserrat Caballé disparue l'année dernière, je vous laisse avec son interprétation de cette habanera. Très émouvant de la revoir interpréter cette pièce juste deux ans avant sa mort...avec la modestie qui la caractérisait.

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Rédigé par alea-jacta-est

Publié dans #Espagne, #Zarzuela, #Habanera, #Manuel Penella, #Montserrat Caballé

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Publié le 10 Février 2019

Bonjour les amis,

CHAMPIONS de Javier Fesser a obtenu samedi dernier le GOYA du meilleur film.

Alors, on m'en avait dit beaucoup de bien dans mon entourage mais je ne l'avais pas encore vu...C'est maintenant chose faite et grand bien m'en a pris.

Voici le synopsis du film.

Marco occupe le prestigieux poste d’entraîneur-adjoint de l'équipe d'Espagne de basket. Mais son mauvais caractère lui pose problème. Après une série de déconvenues dont il est le seul responsable, Marco se retrouve à devoir coacher une équipe de déficients mentaux.

Ce genre de film il vaut mieux le voir en VO. Voici la bande.annonce espagnole pour vous plonger dans l'atmosphère authentique de cette histoire.

CAMPEONES, c'est le genre de film dont on imagine dès les premières minutes comment vont évoluer les relations entre l'entraîneur Marco Montes et son équipe de déficients mentaux.

 Oui, mais il y a aussi beaucoup de savoir-faire chez Javier Fesser qui prend le temps de nous installer dans son histoire et de nous dépeindre toute une gallerie de personnages drôles, émouvants et attachants sans que sa comédie ne perde de son rythme...très important, le rythme dans une comédie et celui-ci est bien maintenu dans le film de Fesser...

A noter l'interprétation hors-pair de Javier Gutierrez, génial dans son rôle d'entraîneur de basket énervé et survolté qui doit apprendre à prendre sur lui...

Le réalisateur sait aussi nous réserver quelques surprises et parfois l'émotion nous saisit quand on ne s'y attend pas...ou, du moins, l'émotion nous saisit mais pas de la manière avec laquelle on s'y attendait.

Voici ce qu'écrit Rachel L sur la page allociné:

" Et oui, même les non - sportifs vont adorer les supporter. Je trouve qu'il y a un respect du spectateur à ce niveau là, les scènes sportives ne devenant plus longues qu'une fois que le spectateur est séduit, c'est alors un vrai plaisir de suivre leurs évolutions, leurs progrès, et leurs petits trucs " bien à eux" qui nous font souvent bien rire sans aucune culpabilité. Le sujet ayant pour but de nous sensibiliser sans jamais se moquer, tout devient naturel. Les dialogues sont pertinents, avec quelques réflexions qui deviendront certainement des phrases cultes. L'acteur principal nous fait bien ressentir la situation depuis " je n'ai pas le choix " jusqu'à la leçon de vie qu'il va en tirer, et nous avec. Les acteurs sont vraiment attachants et drôles. Et la mouche casse-c.....s , une vraie bouffée d'air frais au milieu de cette équipe masculine. Quand au final, on reste scotchés. Ce sont eux les maîtres et nous les élèves... Alors oui, le sujet a déjà été traité, mais comment résister à un tel chef d'oeuvre! "

Je terminerai en vous disant qu'il y a aussi dans cette comédie du côté des personnages "normaux" des caractères qui sont assez savoureux également.

Et puis, un grand coup de chapeau à Javier Gutierrrez, un acteur que j'adore, qui nous fait un numéro GEANT...un numéro à la Nicholson...!

 

CHAMPIONS de Javier Fesser...
CHAMPIONS de Javier Fesser...

PS: l'autre grand film qui a été primé durant la cérémonie des GOYA, c' est EL REINO qui parle de la corruption en Espagne. J'ai prévu de le voir la semaine prochaine et je vous en reparlerai éventuellement...

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Rédigé par alea-jacta-est

Publié dans #Cinéma, #Comédie, #Espagne, #Déficients mentaux, #Basket, #Goya 2019

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