Bonjour les amis,
Vous avez remarqué que depuis quelques semaines je vous propose de revisiter l' activité musicale des années 70 qui furent particulièrement fécondes et dont nombre de jeunes gens d' aujourd' hui n' ont pas encore capté tout l'héritage important pour le patrimoine universel de la Musique.
Dans ces années-là, le Rock cherchait ses lettres de noblesse,voulait échapper à l' étiquette de musique de divertissement, et tendre parfois des ponts avec la Musique contemporaine qui bénéficie d' un grand prestige culturel.
Evidemment, pour entrer dans le monde fermé de la musique contemporaine il faut montrer patte blanche et être capable de composer des oeuvres qui aient un minimum de facture musicale et qui dénotent d' une richesse et d' une connaissance harmonique qui ne sont pas dans les cordes de compositeurs qui n' auraient pas reçu de solide formation d' harmonie orchestrale.
Je vous rappelle que , par exemple, tous les grands titres des Beatles étaient arrangés par Georges Martin le 5 ème Beatles, qui lui, savait écrire pour orchestre, ce qui n' était absolument pas le cas de Mc Cartney , ni de Lennon qui étaient de bons mélodistes.
A cette époque, la musique de Pink Floyd rencontrait un vif succès dans le monde des cadres supérieurs qui aimaient se relaxer et déstresser en écoutant de la musique planante après une longue journée de travail harassant.
Cette musique était très soignée, avec des arrangements peaufinés de grande qualité plastique grâce au travail de Rick Wright. Elle contenait aussi beaucoup d' éléments empruntés à la musique contemporaine, notamment avec l' usage de très nombreuses percussions, mais la base harmonique des créations de Pink Floyd était surtout empruntée au Blues et au Jazz.
Les solos de Gilmour sont presque tous construits sur des gammes pentatoniques, et certains morceaux de Wright ( même s' ils ont reçu "un habillage rock") sont en réalité construits sur des accords de Jazz.
Mais en 1970, le groupe va se lancer dans un projet musical qui proposera une fusion improbable entre le Rock et la musique contemporaine en collaborant avec Ron Geesin, un compositeur écossais très original et avant-gardiste.
Cela donnera l' album ATOM HEART MOTHER dont voici la pochette ci-dessous.
Sur ce 33 tours figure le morceau Atom Heart Mother de 24 minutes qui donne le nom à l' album.
Un morceau, composé de plusieurs parties, dans lequel apparaîtront des instruments d' orchestres (avec une grosse section de cuivres, violoncelles, etc...), des bruitages ( dont notamment le bruit du moteur d' une moto qui accélère, des bombardements, etc...), une chorale, les claviers et synthétiseurs modernes, et les instruments classiques du Rock ( guitares, basse, batteries).
Ce fut un pari fou, mais un pari parfaitement réussi et gagné qui enthousiasma les auditeurs.
Alors, j' ai appris grâce à un ami internaute qu' il y avait eu un concert au Châtelet avec Ron Geesin au piano et l' Orchestre de Radio France en 2012.
C' est une excellente initiative que je ne peux que saluer.En effet, de la même manière qu' on réinterprète aujourd' hui des oeuvres de Bartok ou de Ravel, j' estime que certains chefs d' ouevre du Rock méritent d' être réinterprétés comme des classiques.
Si j' avais été à Paris à l' époque je n' aurais pas raté ce concert-là ! Heureusement pour moi, je peux disposer sur youtube du magnifique témoignage audiovisuel que j' ai mis en lien ci-dessous !
Avant de passer ce morceau, je conseillerais à ceux qui ne connaissent pas l' oeuvre de ne pas l' écouter en diagonale et de manière superficielle.Elle est riche et mérite un autre traitement.Prenez vous 23 minutes et savourez-en chaque instant. Elle le mérite.
Voici quelques points de repère.
2 min 17 sec: exposition du thème musical après une intro très contemporaine, brillante, avec de belles tensions harmoniques
3 min 58 sec: solo de violoncelle
5 min 20 sec: solo de guitare avec emploi du bottle neck
6 min 54 sec: entrée du choeur
11 min 24 sec: passage instrumental + choeurs
17 min : retour du thème principal
Alors après ce disque certains utiliseront pour le progressive rock le terme de ROCK SYMPHONIQUE qui est une étiquette que je n' aime pas.
ATOM HEART MOTHER reste un disque à part.C' est une parfaite réussite mais il n' y aura pas d' épidémie de disques de rock symphonique.Il y en aura d' autres dont je parlerai un jour, mais on peut les compter sur les doigts de la main.
Enfin pour les fans qui auraient été séduits par ce concert, je vous propose l' original studio des années 70 avec des arrangements très " chiadés"...Je l' ai écouté quelques milliers de fois sur ma platine DUAL des années 70...J' en connais la moindre note car , au cas où vous ne vous en seriez pas rendu compte, je suis un grand fan de la première heure de la musique de Pink Floyd.
PS: Pour la petite histoire sachez que Stanley Kubrick, très emballé par ce morceau avait demandé au groupe Pink Floyd d ' en utiliser des passages dans son film ORANGE MÉCANIQUE, et que ceux-ci avaient refusé poliment...Plus tard, en se rendant compte que ce film était un pur chef d' oeuvre, les musiciens ont un regretté leur refus initial, mais il était un peu tard...
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