Bonjour les amis,
Il y a deux jours je vous parlais de Frida Boccara et j' avais mis en lien l' une de ses chansons inspirée d' une Aria de la Passion selon Saint Mathieu de J.S. Bach, et intitulée Cent mille chansons.
Alors cette chanson m' a replongé dans un épisode très précis de mon histoire personnelle:
le jour où J.S. BACH est entré DÉFINITIVEMENT dans ma vie.
C' était dans les années 80. Je prenais des vacances dans le Nord de l' Italie et je me baladais dans Florence à la nuit tombée.Je me dirigeais vers mon hôtel quand j' aperçus un attroupement de personnes devant la Basilique San Lorenzo.
C' était complètement inhabituel car à cette heure tardive les églises sont fermées.Je m' approche du groupe et demande à un vieux monsieur italien le motif de cet attroupement, et celui-ci m' explique qu' il va y avoir un concert de musique sacrée.Il s' agit d' un grand choeur bavarois accompagné de tout un orchestre qui vont interpréter la Passion selon Saint Mathieu de J. S. BACH.
Il me précise que l' ensemble orchestral allemand est de grande qualité technique et que le samedi suivant ils doivent interpréter cette même Passion au Vatican devant le Pape Jean-Paul II.
Je sympathise avec ce charmant mélomane italien qui m' explique qu' il est tout seul,que je peux voir le concert avec lui et qu' il en profitera pour m' exposer les grandes lignes de l' oeuvre, et comment elle s' articule.Bien évidemment j' accepte son invitation sans la moindre hésitation.
Je ne connaissais presque rien de J. S. BACH à l' époque mais j' ai tout de suite été emballé par le fait de pouvoir assister, de manière complètement improvisée, à l' exécution d' une oeuvre d' une telle envergure.
Nous sommes entrés dans l' Eglise.J' ai pris un des carnets à disposition du public avec le texte original de l' oeuvre traduit en 4 langues.Mon ami transalpin s' installa près du choeur sur la gauche.Nous étions très bien placés.
Quand le concert commença, mes amis, ce fut tout de suite LE CHOC !
Ecoutez les 3 premières minutes...
Pendant que vous entendez le début de cette oeuvre sur vos enceintes dites vous que dans une église, avec la réverbération naturelle qu' il y a,l' effet est très impressionnant: vous êtes subitement projeté dans la 5 ème dimension....Et dès que le choeur entre à 2 minutes trente secondes on en attrape la chair de poule.
Je me sens littéralement transporté par l' ampleur et la profondeur de cette oeuvre imposante et magistrale.Au fil des minutes, je m' installe peu à peu dans cette Passion en suivant sur le carnet la traduction des parties chantées pour ne pas en perdre une miette.
Puis arrivent les parties pour soliste, dont notamment le fameux ERBARME DICH, MEIN GOTT.
L' une des plus belles pièces jamais composées.Si vous n' êtes pas ému c' est que vous n' êtes pas complètement humain...
Le " Mache dich mein herze rein"...( qui fut réadapté par Frida).
L' oeuvre durera près de 3 heures, et quand arrivera la partie finale avec le choeur, je serai au bord des larmes.
Je n' avais jamais entendu rien de tel...J' étais soufflé !
Ce concert, ça a été un vrai choc, une révélation.Dès que je suis rentré à Paris je me suis précipité à la Fnac pour acheter le disque.Comme je n' y connaissais rien, j' ai commencé avec Karajan.Plus tard j' écouterai d' autres versions sur instruments anciens. Harnoncourt, Herreweghe, etc...
Je pris durant la même semaine la décision de m' inscrire à l' école de musique Paul Beuscher ( cours de solfège et de piano, alors que j' avais 26 ans).
Je dirai à mon professeur de piano: " Il faut que vous m' appreniez à jouer du Bach..."
Celui-ci sourira et me fera remarquer que le piano n' existait pas à son époque...Peu importe !
Oui ce concert avait définitivement changé ma vie.Bach ne me quittera plus jamais.
je travaillerai sur ses préludes et fugues avec acharnement pendant des dizaines d' heures.
Plus tard, je découvrirai l' étendue de son oeuvre orchestrale et instrumentale.Un véritable puits sans fond...Une production qui donne le vertige.
L' artiste le plus fécond et le plus universel de toute l' humanité.
Je lirai avec avidité sa biographie très dense écrite par Roland de Candé.
Un certain nombre d' années plus tard j' intègrerai une chorale qui me permettra d' interpréter certaines de ses oeuvres comme le Jesu Bleibet, meine freunde.
Non, Bach ne me quittera plus jamais.
Il est le seul artiste ( avec Mozart) qui m' a fait douté de la non-existence de Dieu car, quand on interprète ses oeuvres Dieu n' est jamais loin.
C' est le seul compositeur dont je ne me suis jamais lassé.Jamais !
Bien sûr, je continuerai de me passionner pour des tas d'autres compositeurs, des tas d' autres musiques, mais Bach m' accompagnera toujours et de manière définitive.Comme un bon ami toujours présent dans les meilleurs moments comme dans les pires.
Et vous savez quoi ?
Si on m' abandonnait sur une île déserte avec la possibilité d ' emmener toutes les oeuvres d' UN SEUL compositeur, d' après vous, lequel choisirais-je ?
Alors pour revenir à la chanson de Frida Boccara. Elle y parle de cent mille chansons, de cent mille saisons.
Comment ne pas penser à Bach qui fût tout cela !
Cent mille chansons, cent mille saisons .CENT MILLE SOLEILS RADIEUX !
Bach, d' une fécondité prodigieuse, qui ne se répétait jamais,et qui composait le Bonheur, tout simplement.
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