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21 novembre 2024 4 21 /11 /novembre /2024 10:10

Bonjour les amis,

Je suis plongé dans la lecture d'un ouvrage absolument passionnant  intitulé LE SIÈCLE DU POPULISME, écrit par Pierre Rosanvallon professeur au collège de France.

Le siècle du populisme...

Il y a une très belle présentation de ce livre que je vous invite à lire sur le lien ci-dessous.

 

Le mérite de ce livre est de nous offrir d'abord une vision historique très complète qui va de la naissance du populisme (qui se décline de différentes manières sur les 5 continents) jusqu'à son essor au XXI ème siècle.

Il nous apprend à bien reconnaître le populisme à travers des indices clairs et bien précis qui ne trompent pas sur sa nature.

Tous les populismes se réclament du peuple. Mais bien évidemment la question qui se pose vite est la propre définition de ce peuple. Rosanvallon en explique bien tous les sens, le peuple pris comme corps civique constitué (celui de la déclaration de la constitution américaine: WE THE PEOPLE), ou peuple entendu comme entité ou catégorie sociale (celui qui prend d'assaut la Bastille).

Pierre Rosanvallon ne présente pas son ouvrage comme un brûlot anti-populiste mais nous invite à mieux  comprendre le phénomène populiste: de quoi il témoigne et de quels besoins non satisfaits il est l'expression.

Malgré tout, et bien qu'il s'en défende, son étude critique à la fin de l'ouvrage confirme  tout le mal que je pense personnellement des populismes, qu'ils soient de droite ou de gauche.

En fait son livre m'aide à mieux approfondir ma réflexion sur ce sujet, en l'élargissant et en me fournissant aussi plus d'arguments que ceux dont je disposais jusque maintenant.

Pour être précis le livre formule aussi des objections personnelles que j'avais parfois du mal à exprimer, notamment à l'époque de l'émergence du mouvement italien CINQUE ESTELLE ( 5 étoiles), un mouvement populiste qui me paraissait très dangereux avec ses idées de démocratie directe via internet (surtout quand on connaît mieux aujourd'hui les méfaits pervers des réseaux sociaux et des fake news).

En conclusion, c'est un livre riche, pas toujours facile à lire, un livre devenu NÉCESSAIRE aujourd'hui qui me permet de mieux penser le populisme de manière plus documentée et plus rigoureuse.

Le siècle du populisme...

PS: J'ai eu la bonne surprise de découvrir que ce livre est également traduit en espagnol. Donc j'en fais la promotion également dans tout mon entourage direct et sur les réseaux sociaux.

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9 octobre 2024 3 09 /10 /octobre /2024 10:22

Bonjour les amis,

Aujourd'hui 9 Octobre c'est en Espagne le jour de la communauté de Valencia dans laquelle je vis depuis plusieurs décennies.

Vous en saurez plus sur cette journée commémorative sur le lien ci-dessous.

Pour rendre hommage à une terre il n'y a rien de mieux qu'une chanson et je vous propose BALANSIYA qui est une sorte d'hymne récent, fruit de la collaboration de plusieurs artistes et groupes valenciens.

C'est une chanson qui revendique un patrimoine linguistique et culturel qui a souffert de répressions durant les années noires du franquisme, un patrimoine qui veut ressurgir aujourd'hui avec force et énergie. Par ailleurs, la langue valencienne doit continuer de se défendre aujourd'hui encore des attaques de certains partis de droite comme le PP (partido popular) ou de l'extrême-droite de VOX qui tentent de limiter sa présence à l'école ou dans les institutions et services publics.

https://www.youtube.com/watch?v=iCUACBxDJOg&t=4s

Voici les paroles originales en valencien qui est la langue co-officielle de ma région.

Una alqueria
estreles i flors
abraça l’aurora
un país de cançons
els joves dansen
la lluna ha mudat
no plores mare
que el cel està albat
ha mort la innocència
en l’han arrancat
ja no hem de mentir
per dir la veritat
la nostra alegria
no ens la dona el vi
és l’emoció pura
que ens batega al pit

La teua presència
és com una oració
pregue morir
si no visc no amb amor
tot l’univers està dins de tu
naveguen les barques
com rajos de llum
pels oceans
d’aigües sensorials
al centre de tot
on brolla qui soc
un camp magnètic
sense coordenades
melodies nues
de cançons sagrades

Palmes, postisses
guitarra i dolor
no et posem cara
però et sentim al cor
gemecs sense esquema
art de resistència
veus esguerrades
d’exili interior
negra és l’esperança
que es perd però se sent
verda és la mort
que no vol fer el dol
ara ho entenc i no puc callar
se m’eriça la pell
quan t’escolte cantar

Una sandinga,
una seguidilla
una malaguenya
una granaïna
la llavor germina
plora i s’extasia
quan s’obri en canal
la nostra ferida
redades, presons
expulsions i matances
no han pogut callar
l’emoció amb què cantes
et perseguiren
però tu et camuflares
prenyares per sempre
les nostres entranyes

A les nits de l’alqueria
hi ha llaüts i guitarrons
pintant les penes d’alegria
amb cançons de mil colors

Les cantarem tota la nit
no oblidarem
que ens van ferir
que la música és la sang
la festa i la tradició
del nostre País Valencià

A les nits de l’alqueria
a la lluna de Balansiya
Les nostres festes
seguirem cantant
amb la resiliència
que vam heretar
canviaren les lletres
per negar qui eren
i sobreviure
a les seues fogueres
memòria amputada
versos mutilats
queda un dolor íntim
que no hem oblidat
van cremar els llibres
però guardem al pit
la biblioteca
dels nostres sentits

No parle d’altres
parle de nosaltres
les arrels profundes
que ens van ocultar
negres jueves
morisques gitanes
filles prohibides      
de Balansiya
els teus melismes
són recitacions
la pena perviu
a les nostres cançons
et perseguiren
però tu et camuflares
prenyares per sempre
les nostres entranyes

 

Voici maintenant une traduction très sommaire, mot à mot, dont le mérite est surtout de vous donner une idée générale du sens des paroles cette chanson.

Une ferme
étoiles et fleurs
embrasse l'aube
un pays de chansons
les jeunes dansent
la lune a changé
ne pleure pas maman
que le ciel se lève
l'innocence est morte
ils nous l'ont arraché
nous n'avons plus besoin de mentir
Nous devons dire la vérité
notre joie
ce n'est pas le vin qui nous la donne
c'est l'émotion pure
celle qui bat dans notre poitrine

ta présence
c'est comme une prière
je t'en prie, meurs si je ne vis pas,
l'univers entier est en toi
les bateaux naviguent
comme des rayons de lumière
au bord des océans
des eaux sensorielles
au centre de tout
d'où vient qui je suis
un champ magnétique
sans coordonnées
mélodies nues
des chants sacrés


Battements de mains, castagnettes
guitare et douleur
nous ne te faisons pas face
mais nous te sentons dans nos cœurs
gémissements sans contours
art de la résistance
voix déformées
d'exil intérieur
Noire est l'espérance
qui se perd et qu'on n'entend plus
Verte est la mort
qui ne veut pas pleurer
maintenant je comprends et je ne peux pas me taire
j'attrape la chair de poule
quand je t'entends chanter

Une sandinga,
une malagueña
une chanson de Grenade
la graine germe
cris et extases
quand s'ouvre de manière béante
notre blessure
perquisitions, prisons
expulsions et meurtres
ils ne pouvaient pas nous taire
l'émotion avec laquelle tu chantes
ils t'ont pourchassé
mais toi tu t'es camouflé
laissant pour l'éternité une semence dans nos entrailles

Dans les nuits de la ferme
il y a des luths et des guitarrons
peindre les chagrins avec joie
avec des chansons aux mille couleurs

Nous les chanterons toute la nuit
nous n'oublierons pas
ça nous a fait mal
cette musique est le sang
la fête et la tradition
de notre pays valencien

Dans les nuits de la ferme
sur la lune de Balansiya
Nos soirées
nous continuerons à chanter
avec la résilience
dont nous avons hérité
ils ont changé les paroles
nier qui ils étaient
et survivre
à leurs feux de joie
mémoire amputée
vers mutilés
une douleur intime demeure
qu'on n'a pas oublié
ils ont brûlé les livres
mais nous gardons contre notre poitrine
la bibliothèque
de nos sens

Ne parle pas des autres
parle de nous
les racines profondes
qu'ils nous ont caché
juifs noirs
Maures gitans
filles interdites
depuis Balansiya
tes mélismes
ce sont des récitations
la pénalité perdure
dans nos chansons
ils t'ont poursuivi
mais tu t'es camouflé
et laissé pour l'éternité

une semence dans nos entrailles

Nota Bene. Explication du titre de cette chanson.

 La taïfa de Valence ou taïfa de Balansiya fut l'un des royaumes de taïfa fondés à l'éclatement du califat de Cordoue en 1010. Il dura jusqu'en 1238, année au cours de laquelle la conquête menée par Jacques Ier d'Aragon conduisit à l'instauration du royaume chrétien de Valence.

Entre 1094 et 1099, la taïfa de Valence est gouvernée par Rodrigue Díaz de Vivar, dit Le Cid.

 

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14 février 2024 3 14 /02 /février /2024 10:02

Bonjour les amis,

Il y a des infos qui sont tellement surréalistes qu'on est obligé de se pincer deux fois pour être bien sûr qu'on n'a pas été victime d'une hallucination en les lisant.

En voici une qui n'est pas piquée des vers.

Voici ce qu'a répondu Kaja Kallas dans un communiqué:

"La Russie peut croire que l'émission d'un mandat d'arrêt fictif fera taire l'Estonie. Je refuse d'être réduite au silence : je continuerai à soutenir ouvertement l'Ukraine et à plaider en faveur du renforcement des défenses européennes".

La dirigeante a également accusé Moscou d'avoir caché, tout au long de l'histoire, ses actions répressives sous couvert de « maintien de l'ordre ». "Cela me semble très familier : ma grand-mère et ma mère ont été déportées en Sibérie, et (à l'époque) c'est le KGB qui a émis de faux mandats d'arrêt", a-t-elle déclaré. "J'ai toujours soutenu que la boîte à outils criminelle du régime russe n'a pas changé. Nous refusons de nous laisser intimider par les tactiques de menaces de la Russie".

Alors ce qui choque terriblement c'est d'abord le manque de précision sur la nature concrète des faits qui sont reprochés à ces dirigeants mais surtout, et après les avoir relus deux fois, on se dit que c'est bien la première fois qu'un Etat s'arroge le "droit" ( mais quel droit??!!) de lancer un avis de recherche contre des représentants élus d'une démocratie souveraine pour ce qui semble surtout être un délit d'opinion (en imaginant que ces représentants vivent en Russie et non pas dans un pays libre).

Nous voilà donc au coeur du vrai problème. Cette liberté affichée par les baltes, qui ne va pas dans le sens d'une glorification du rôle historique de leur voisin et ex-envahisseur, semble être absolument insupportable au maître du Kremlin. Pour lui cette liberté c'est avant tout une menace.

Les faits reprochés à la première ministre balte peuvent justifier tout au plus une rupture des relations diplomatiques entre les deux pays mais rien de plus (notons au passage que ces relations sont réduites au strict minimum avec juste la nomination de chargés d'affaires provisoires).

Rappelons que les baltes ont été victimes de menaces existentielles depuis les années 90 lors de débats houleux à la Douma, débats durant lesquels des nationalistes exaltés et fascisants exigeaient la réincorporation immédiate par la force militaire de ces Etats à la Russie.

Imaginez, chers amis, la consternation et la tête que faisaient les citoyens baltes en entendant de tels débats chez leurs voisins, des voisins qui se disputent dans leur assemblée nationale sur le fait de venir vous réenvahir une 2ème fois.

Permettez-moi une métaphore à 2 balles: c'est un peu comme si j'étais témoin dans mon jardin du fait que mes deux voisins sont en train de se disputer sur le fait de venir me casser (ou pas) la figure.

Dans un tel contexte de menace constante, qui oserait reprocher aux représentants baltes leur adhésion à l'Otan? Sans cette adhésion l'ours russe n'aurait fait qu'une bouchée de ces petits pays.

Ce ne sont pas les ukrainiens qui viennent d'être agressés sauvagement bien que vivant dans un pays bien plus grand que l'Estonie qui diront le contraire.

Je terminerai en répétant des propos que j'avais entendus l'année dernière. Si Poutine avait été un agent de la CIA chargé de renforcer le poids de l'OTAN en Europe il ne s'y serait pas mieux pris.

Face aux agissements de plus en plus menaçants et erratiques du maître du Kremlin, la seule conclusion indiscutable à laquelle arrivent les occidentaux c'est de se dire que, fort heureusement, l'Otan existe encore et nous offre un bouclier crédible pour nous prémunir de cet agité du bocal qu'est Poutine.

L'Otan était dans le coma selon Macron et Poutine l'a ressuscité.

Grâce à l'Otan on peut maintenir une certaine tranquillité prudente en se disant:

" Le chien aboit...la caravane passe..."

Dans le contexte actuel d'agression de la Russie contre l'Ukraine, cette accusation de la police russe ça frise le burlesque, sauf que ce n'est pas drôle...on se dit qu'elle n'a qu'un seul intérêt, un seul objectif: servir les intérêts de la propagande russe au niveau interne et réalimenter les ressentiments et la haine de la population russe contre leurs voisins. 

La politique extérieure profondément criminelle de Poutine a précipité son pays dans une logique de guerre qu'il faut sans cesse justifier et réalimenter grâce à la censure et à la propagande.

PS: Cette accusation est-elle destinée à faire jeu égal et minimiser celle qui pèse sur Poutine qui est sous mandat d'arrêt international par le tribunal de La Haye pour crimes de Guerre ?...parce que si c'est le cas les accusations qui visent Poutine sont infiniment plus graves que celles qui pèsent sur la première ministre estonienne. Tout cela est vraiment pathétique. La Russie est devenue une grosse farce anachronique, une caricature ubuesque et monstrueuse...

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24 janvier 2024 3 24 /01 /janvier /2024 11:32

Bonjour les amis,

J'ai fini cette semaine la lecture du livre d'Amin Maalouf intitué LE NAUFRAGE DES CIVILISATIONS, un essai en tout point passionnant qui m'en a beaucoup appris sur notre histoire contemporaine.

Quand Amin Maalouf met en perspective l'état de notre monde...

Voici un commentaire qui m'a paru très pertinent d'Apoapo sur la fiche babelio du livre qui présente mieux le contenu de cet essai que la présentation de l'éditeur. 

Encore une fois, et plus que jamais, Amin Maalouf assume sa place de conscience morale de notre époque. Cet essai, avant d'être une sonnette d'alarme prédisant les multiples menaces de naufrage qu'encourt l'humanité avec ses civilisations plurielles, est d'abord un livre d'Histoire du XXe siècle, ou plus exactement des cent dernières années. Il possède une thèse qu'il démontre avec brio : c'est bien la fin du monde levantin, et de ce creuset d'humanisme qu'il a incarné et alimenté, qui nous a précipité dans la tempête ; non que le système politique (ottoman ou en général impérial) fût idéal, mais parce que la situation anthropologique qu'il avait permis contenait des antidotes contre des forces mortifères qui se sont déchaînées depuis. Moi qui ai vécu dans et travaillé sur la levantinité ne peux qu'ajouter un attachement sentimental à mon adhésion intellectuelle à cette approche historico-politique.
Cependant, je reconnais que de l'extérieur l'on puisse se demander – critique qui a déjà été adressée à Maalouf – si ce n'est pas sa propre position, voire sa propre identité, qui lui dicte sa lecture ; si la démonstration et donc ses prédictions sobrement alarmistes ne se voient pas fragilisées par la centralité qu'il accorde, notamment, à l'histoire du monde arabe en particulier depuis Nasser. Je pense en particulier, comme l'auteur qui s'entoure de précautions, à ces deux phrases de la conclusion :
« Je demeure convaincu [...] que si le Levant pluriel avait pu survivre et prospérer et s'épanouir, l'humanité dans son ensemble, toutes civilisations confondues, aurait su éviter la dérive que nous observons de nos jours. C'est à partir de ma terre natale que les ténèbres ont commencé à se répandre sur le monde. » (p. 328)
En effet, le livre s'organise autour de quatre longs chapitres, dont les deux premiers se centrent sur le monde arabo-musulman. le Ier « Un paradis en flammes » traite des conséquences longues du démembrement de l'Empire ottoman sur la disparition du cosmopolitisme pacifique et humaniste, en particulier en Égypte et ensuite au Liban : une période dont l'auteur n'a pas été témoin mais récepteur du récit familial ; II « Des peuples en perdition » traite de l'avènement de la « haine de soi » chez les Arabo-musulman : il est question à la fois des guerres arabo-israéliennes, avec une centralité tout-à-fait particulière pour celle dite des « Six Jours » de juin 1967, et aussi du débat politique d'arrière-plan qui, parmi les musulmans à l'instar de tout le monde, se caractérisait par la dialectique pour ou contre le marxisme et le tiers-mondisme ; III « L'année du grand retournement », indique comme date emblème l'année 1979 : l'année de la révolution conservatrice de Thatcher et Reagan mais aussi celle de l'ayatollah Khomeiny en Iran, sans oublier (à un an près) celle du Parti communiste chinois de Deng Xiaoping ; année également de l'enterrement du projet du « compromis historique » en Italie suite au meurtre d'Aldo Moro, et du début de la chute de l'Union soviétique par son invasion catastrophique de l'Afghanistan, ayant produit l'apparition du jihadisme moderne globalisé qui a pour acte de naissance l'assaut de la grande mosquée de la Mecque (novembre 79) ; IV « Un monde en décomposition » se limite donc à relater certaines parmi les répercussions de ces événements qui, dans leur synchronicité, ont ouvert l'approche historique sur un angle mondial : conséquences de l'étrange renouveau de la croyance en la mystérieuse « main invisible » en économie, fragmentation des nations et nouvelles solidarités tribales et claniques, diffusion planétaire, par le changement du paradigme économique, de la corruption, de la fraude et de la rapacité, incapacité américaine de succéder à la bipolarité et méfiance mondiale envers toute tentative de gouvernance supra-nationale, tentations orwelliennes de renoncement à la liberté au profit de la sécurité, inaptitude à gérer les défis environnementaux et ceux des nouvelles technologies...
Pour ma part, même si l'on réfutait la thèse du livre, même si l'on contestait la position de l'observateur – journaliste avant de devenir auteur –, même si l'on doutait de ses conclusions au nom du principe « post hoc non est propter hoc », il resterait une analyse historique impeccable, possédant suffisamment de hauteur pour assurer la stature de l'Académicien (successeur de Claude Lévi-Strauss) que Maalouf incarne admirablement. Merci pour ce livre.

https://www.babelio.com/livres/Maalouf-Le-naufrage-des-civilisations/1120436

Voici une série de citations extraites du livre


« Je ne doute pas qu'il se trouve, sous tous les cieux, d'innombrables personnes de bonne volonté qui veulent sincèrement comprendre l'Autre, coexister avec lui, en surmontant leurs préjugés et leurs craintes. Ce qu'on ne rencontre presque jamais, en revanche, et que je n'ai connu moi-même que dans la cité levantine où je suis né, c'est ce côtoiement permanent et intime entre des populations chrétiennes ou juives imprégnées de civilisation arabe, et des populations musulmanes résolument tournées vers l'Occident, sa culture, son mode de vie, ses valeurs.
Cette variété si rare de coexistence entre les religions et entre les cultures était le fruit d'une sagesse instinctive et pragmatique plutôt que d'une doctrine universaliste explicite. Mais je suis persuadé qu'elle aurait mérité d'avoir un grand rayonnement. Il m'arrive même de penser qu'elle aurait pu agir comme un antidote aux poisons de ce siècle. » (p. 78)

« Je me suis souvent demandé s'il n'y avait pas eu, dans l'histoire du communisme, dès l'origine, un énorme sous-entendu, partagé de manière consciente ou inconsciente par les fondateurs, par les adeptes, comme par les détracteurs, et qu'on pourrait formuler comme suit : ce n'est pas seulement aux prolétaires que Marx a promis, en quelque sorte, le salut, mais également aux minoritaires, à tous ceux qui ne pouvaient s'identifier pleinement à la nation qui était censée être la leur. C'est ainsi, en tout cas, que beaucoup de gens ont compris son message. » (p. 98)

« Désormais, c'est le conservatisme qui se proclamerait révolutionnaire, tandis que les tenants du "progressisme" et de la gauche n'auraient plus d'autre but que la conservation des acquis. » (p. 170)

« J'ai dit que les régimes communistes avaient déconsidéré pour longtemps les idées universelles qu'ils étaient censés promouvoir. Je me dois d'ajouter que les puissances occidentales ont, elles aussi, abondamment discrédité leurs propres valeurs. Non parce qu'elles ont combattu avec acharnement leurs adversaires marxistes ou tiers-mondistes – cela, on pourrait difficilement le leur reprocher ; mais parce qu'elles ont instrumentalisé avec cynisme les principes universels les plus nobles, au service de leurs ambitions et de leurs avidités ; et, plus que cela encore, parce qu'elles se sont constamment alliées, particulièrement dans le monde arabe, aux forces les plus rétrogrades, les plus obscurantistes, celles-là mêmes qui allaient un jour leur déclarer la plus pernicieuse des guerres.
Le spectacle affligeant que la planète présente en ce siècle est le produit de toutes ces faillites morales, et de toutes ces trahisons. » (p. 206-207)

« Un monde apeuré, où la surveillance quotidienne de nos faits et gestes serait dictée par notre désir réel et légitime d'être protégés à chaque instant, n'est-il pas, finalement, plus inquiétant encore qu'un monde où cette surveillance serait imposée de force par un tyran paranoïaque et mégalomane ? » (p. 308)

Pour ma part ce livre a été instructif car il a complété mes connaissances très superficielles de certains événements importants de ces dernières décennies. Par exemple j'ai appris que c'est Churchill qui avait insisté auprès des américains afin que ceux-ci organisent un coup d'Etat contre le dirigeant modéré iranien Mohammad Mossadegh.,.. La suite vous la connaissez: il y a eu le Shah, puis sa chute qui amènera la première république islamique...

J'ai mieux compris aussi pourquoi c'est au Liban que l'OLP a cherché refuge dans les années 60: c'est le Roi Hussein de Jordanie qui a empêché son pays de devenir une base arrière des fedayins palestiniens, préférant créer une crise au sein du monde arabe plutôt que de céder.

Grâce à cet essai je comprends mieux  d'une part comment les orientaux nous perçoivent et la justification de certains de leurs ressentiments vis-à-vis de nous, et d'autre part comment s'articulent les rivalités maléfiques et funestes au sein du monde arabo-musulman.

En le lisant me sont revenues en mémoire des conversations que j'avais eu à Paris dans les années 80 avec des étudiants maghrébins, iraniens, libanais,etc...Ces derniers m'avaient peint une vision un peu édulcorée du Liban des années 60 et Maalouf  (tout en confirmant certains de ces témoignages de l'époque) complète le tableau en expliquant les comportements politiques qui allaient amener la tragédie...

Enfin, et c'est le plus important, le Liban est aussi une métaphore de notre planète. Ce pays avait réussi à vivre en paix sans qu'il n'y ait de graves heurts entre ses différentes communautés: les marronites, les druzes, les chiites, les sunnites, les juifs, les catholiques, les catholiques orthodoxes grecs, ceux de l'église arménienne...
Ça a été possible...On sait donc le genre de catastrophes que peuvent amener les replis identitaires.

Mais Amin Maalouf va plus loin et essaie de réfléchir sur ce qui fait que certains pays qui ont vécu des défaites ou des humiliations ont trouvé le moyen de se relever, et comment d'autres, au contraire, se sont enfoncés.

Son livre ne se veut pas désespérant. Je vous mets l'épigraphe du dernier chapitre de son essai ci-dessous:

 

Quand Amin Maalouf met en perspective l'état de notre monde...
Amin Maalouf

Amin Maalouf

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15 octobre 2023 7 15 /10 /octobre /2023 10:16

Bonjour les amis,

Suite à l'actualité dramatique que nous vivons au Moyen-Orient depuis une semaine, je me suis plongé dans le livre de Michel Abitbol qui offre une vaste synthèse de l'histoire d'Israël.

Le nouveau conflit va durer longtemps et j'ai ressenti le besoin de remonter aux sources, d'autant plus que je suis très ignorant, y compris de l'histoire récente de ce pays.

Cette HISTOIRE D'ISRAËL d'Abitbol a pour premier mérite de ne pas commencer à la proclamation d'indépendance : elle rappelle le long cheminement qui va de l'apparition du sionisme dans l'Europe de la fin du XIXsiècle à la constitution du YICHOUV par les immigrants juifs de Palestine, pour finalement aboutir à la création de l'État d'Israël en 1948.

Et là, dès le début du livre, première grosse surprise:

Voici un extrait:

 

Les hassidim du mouvement mystique lancé par le
Baal Shem Tov (1690-1760) et les haredim ultraorthodoxes du rabbin
Moïse « Hatam » Sofer (1769-1839) rejetaient avec véhémence toute
tentative de restauration du royaume d’Israël qui ne fût pas l’oeuvre de
Dieu. Selon eux, le « problème juif » ne saurait être réduit à sa seule
dimension sociale. C’était avant tout un problème métaphysique mettant en
jeu les trois notions eschatologiques fondamentales du judaïsme que sont la
Galout (l’Exil), la Gueoula (la Rédemption) et le Kibboutz Galouyot (le
rassemblement des Exilés). Dès lors, sacrilège serait toute entreprise
« séculière » de retour des Juifs à Sion qui, ipso facto, enfreindrait le triple
serment que les Juifs se seraient engagés à respecter depuis la destruction
du Temple :
« Ne pas monter sur les remparts », c’est-à-dire ne pas émigrer
en masse et en rangs serrés en Terre sainte ;
« Ne pas précipiter la Fin des Temps », en tentant de
reconstruire, par des voies naturelles, le royaume de David ;
« Ne pas susciter le courroux des nations » ou, en d’autres
termes, ne pas se mettre à dos les puissances en cherchant à rétablir
la souveraineté juive en Palestine.

Première grosse idée reçue (pour moi) qui tombe dès le début de la lecture du livre d'Abitbol.

Non, ce ne sont pas les religieux qui étaient en faveur de la création d'un Etat israélien.

Ce n'est que plus tard que les rabbins viendront soutenir les efforts des premiers sionistes...Etonnant, non ?

A propos de la création de l'Etat d'Israël...
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3 mars 2023 5 03 /03 /mars /2023 11:35

Bonjour les amis,

C'est une histoire vraiment étonnante, et dont j'ignorais tout il y a 24 heures encore, dont je vais vous parler aujourd'hui.

Savez-vous qui était EL COMANDANTE YANKEE ?

Son histoire est racontée dans un livre de David Grann intitulé THE YANKEE COMANDANTE.

 

 

Savez-vous qui était EL COMANDANTE YANKEE ?
Savez-vous qui était EL COMANDANTE YANKEE ?
Savez-vous qui était EL COMANDANTE YANKEE ?

Voici le résumé du livre.

Le comandante yankee, c'est William Alexander Morgan, figure héroïque de la révolution cubaine pour les uns, traître national pour les autres. Cet homme intègre n'aura eu qu'un mot à la bouche : Liberté. Mais aussi : Vengeance. En 1957, il se joint aux forces rebelles menées par Fidel Castro pour libérer Cuba du dictateur Batista. Son mobile : venger la mort de l'un de ses amis, torturé et jété aux requins pour avoir fourni des armes aux rebelles. Ce renversement politique permet l accession au pouvoir de Fidel Castro, le même qui ordonnera qu'on le fusille, le 11 mars 1961. Salué pour sa bravoure, Morgan avait obtenu le plus haut grade, celui de commandant, à l'égal de l'autre figure étrangère de cette rébellion, l'Argentin Che Guevara. Cependant, cet Américain proche de Castro éveille bientôt des soupçons... C est un véritable récit de guerre dont David Grann dévoile ici les péripéties, dans un climat politique brûlant, où l'espion­nage est de mise, la trahison une règle. Du moins, le croit-on. Car ce livre, c'est aussi une épopée tragique et sentimentale, le destin hors du commun d'un homme apatride, amoureux d'une guérillera. David Grann entraîne le lecteur dans un véritable thriller, bien qu'il se fonde sur des faits avérés. Il a bénéficié pour ce récit de l'ouverture des archives de la CIA, du FBI et des renseignements militaires. Dans ce reportage de haute volée, Grann fait la lumière sur les idéaux d'une révolution dont l'impact fut mondial et il réhabilite un homme qui y a joué un rôle de premier plan.

Son destin à la fois romantique, tragique et exceptionnel a fait l'objet d'un documentaire dans lequel il apparaît lui-même ainsi que son épouse qui a été incarcérée pendant 12 ans par le régime castriste. Vous pouvez le voir en intégralité  (en VO non sous-titrée) sur ce lien youtube.

Sachez qu'une adaptation au cinéma sous la direction de Jeff Nichols est prévue avec Adam Driver qui tiendra le rôle du Comandante.

Je vous laisse avec la fiche wikipedia qui retrace la biographie de ce Comandante yankee dont le destin réellement hors du commun mérite largement une adaptation cinématographique.

Pour ma part, et en attendant la sortie du film, je vais me lancer dans la lecture du bouquin de David Grann.

Ce sera également aussi l'occasion de me plonger dans l'histoire de la révolution cubaine dont je ne connais à peu près rien.

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1 décembre 2022 4 01 /12 /décembre /2022 09:14

Bonjour les amis,

Le XX ème siècle a été incontestablement celui des dictateurs.

En général ceux-ci ont eu une fin tragique, mais pas toujours.

La fin de Staline, par exemple, est assez exemplaire et contient en elle-même une drôle de morale car le dictateur russe a fini par être lui-même victime du régime de terreur qu'il inspirait.

En effet le tyran avait souffert d'un AVC mais il y avait une telle méfiance envers les médecins depuis le prétendu "complot des blouses blanches" qu'aucun d'entre eux n'osa ou ne pût faire en temps et en heure les gestes nécessaires qui auraient pu le sauver. Staline a fini par mourir par manque de soins pendant que son entourage terrorisé n'osait prendre aucune initiative de peur d'avoir à en répondre plus tard et de finir devant un peloton d'exécution. 

Il se trouve que hier j'ai appris, tout à fait par hasard, que le dictateur portugais António de Salazar avait lui aussi été victime d'un AVC en septembre 1968 mais que, cette fois-ci, le dénouement avait été différent et, pour le moins, assez surprenant.

Suite à son accident vasculaire Salazar avait été immédiatement substitué par Marcelo Cayetano à la tête du gouvernement. Très rapidement Salazar s'était partiellement rétabli de son accident cérébral mais il était clair qu'il était très amoindri et qu'il ne pouvait plus travailler qu'une ou deux heures par jour.

Donc l'entourage de Salazar lui a fait croire qu'il était encore aux commandes de l'Etat portugais alors que ce n'était plus le cas:  tout était feint, tout n'était qu'une énorme mascarade dans la clinique où séjournait le dictateur.

Jusqu'à sa mort deux ans plus tard, le 27 juillet 1970, Salazar vécut sans savoir qu'il n'était plus le chef de l'Etat: on lui envoyait des "mémos", on lui faisait signer des rapports qui finissaient dans la corbeille à papiers, on imitait des réunions de travail complètement bidons, on lui apportait un faux journal édité en un seul exemplaire...🤦‍♀️🤦‍♀️🤦‍♀️

Voilà une supercherie incroyable, mais pourtant vraie, qui aurait pu inspirer une comédie burlesque de Woody Allen.

Encore un fois on voit à quel point les dictatures ont souvent un gros problème avec la simple vérité et qu'elles y font face parfois de manière complètement surréaliste, burlesque.

Par ailleurs, quand on voit ce qui s'est passé avec Salazar on peut imaginer, à postériori, la panique et la grave crise qui auraient eut lieu au Kremlin si Staline avait surmonté son AVC...

António de Salazar

António de Salazar

PS: je vous adjoins un long article sur la biographie d'Antonio de Salazar qui était à la base professeur d'université et qui possédait donc un profil assez atypique si on le compare à celui des dictateurs de son époque.

https://fr.topwar.ru/199720-strannyj-diktator-antoniu-di-salazar.html

PS nº 2: Il semblerait que la fin comico-tragique de Staline et de Salazar ne sera pas celle de Poutine.

En effet l'actuel dictateur russe qui souffre d'un cancer a tout prévu. En cas de pépin il sera substitué par un de ses fidèles qui sera encore pire que lui...

https://www.geo.fr/geopolitique/qui-prendrait-la-tete-de-la-russie-si-vladimir-poutine-venait-a-mourir-210351

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6 juillet 2022 3 06 /07 /juillet /2022 17:28

Bonjour les amis,

il y a 15 jours on m'a prêté un livre une peu hors-normes écrit par Philippe Sands, un grand juriste international franco-anglais dont la famille juive a été décimée durant la seconde guerre mondiale.

Il s'agit de LA FILIÈRE, un ouvrage né de la rencontre de l'auteur avec Horst Von Wächter, fils d'Otto Von Wächter, un dignitaire nazi de très haut rang qui était en contact direct avec Himmler.

Philippe Sands

Philippe Sands

Résumé du livre :
Membre convaincu du parti nazi dès 1923, aveuglément soutenu par son épouse Charlotte, nazie tout aussi fervente, Otto von Wächter a rapidement intégré l'élite hitlérienne, devenant notamment, après l'éclatement de la Seconde Guerre mondiale, gouverneur de Cracovie en Pologne, puis gouverneur du district de Galicie, dans l'ouest de l'Ukraine actuelle - deux territoires qui furent le théâtre de l'extermination des Juifs.
En 1945, après la défaite du Reich, il parvient à fuir, se cache dans les Alpes autrichiennes avant de rejoindre Rome et le Vatican, qui abrite l'une des principales filières d'exfiltration des nazis vers l'Amérique du Sud. C'est là qu'il trouve la mort, en 1949, dans des circonstances pour le moins suspectes. Comment a-t-il pu se soustraire à la justice, de quelles complicités a-t-il bénéficié ? A-t-il été réduit au silence ?
Intrigues politico-religieuses, espionnage, traque et vie cachée d'un criminel, décès énigmatique, dévotion filiale et passion amoureuse, secrets d'alcôve et trahisons : faisant la lumière sur le parcours incroyable d'un haut dignitaire nazi en fuite, l'enquête méticuleuse de Philippe Sands dresse un tableau saisissant de l'échiquier politique à la fin de la Seconde Guerre mondiale et à l'aube de la guerre froide.

 

Le petit Horst en 1944 (il a 5 ans) en compagnie de sa soeur Traute et de ses parents Otto et Charlotte

Le petit Horst en 1944 (il a 5 ans) en compagnie de sa soeur Traute et de ses parents Otto et Charlotte

Alors ce qui est troublant dans ce livre c'est la relation qui se noue entre Philippe Sands (petit-fils de victimes) et Horst ( fils d'un nazi de haut-rang). Horst ne cherche pas à nier les horreurs de la shoah ni  à les justifier, mais il tente de défendre la mémoire de son père qu'il considère comme un " homme décent, un homme de bien" qui aurait été pris dans la tourmente hitlérienne. Otto aurait été, selon Horst, une personne séduite dès le départ par le projet hitlérien mais n'aurait jamais signé de sa propre main l'éxécution de milliers de personnes innocentes.

Evidemment, on n'a pas retrouvé de tels documents, mais on voit mal, étant donné les responsabilités d'Otto Von Wächter durant la guerre (il était ni plus ni moins que gouverneur en Pologne et aussi en Ukraine) comment ces exactions auraient pu se produire sans son approbation directe,  même si on ne trouve pas de traces d'ordres signés de sa part. Cela paraît invraisemblable.

Malgré tout l'attitude ouverte de Horst durant l'enquête menée par Sands nous interpelle car on sent la sincérité d'un homme qui croit que son papa aurait été incapable de telles abominations. Horst explique même, mais sans en apporter la preuve, que son père aurait aidé des juifs notamment en Ukraine.

Horst va commencer à fournir à Sands quantité de documents familiaux qui permettront à celui-ci d'ouvrir une véritable enquête assez approfondie.

Horst Von Wächter de nos jours

Horst Von Wächter de nos jours

Quand je suis arrivé à peu près à la moitié du livre Philippe Sands parle d'un documentaire réalisé par David Evans dans lequel apparaissent 3 personnages: Horst, Philippe Sands, et Niklas Frank, fils d'un autre dignitaire nazi de très haut rang qui a été jugé à Nuremberg et condamné à mort par pendaison. Le père de Horst avait travaillé sous les ordres du père de Niklas.

Niklas  contrairement à Horst ne pardonne rien à son père. Il s'en explique: " Mon père a reçu une éducation religieuse qui lui a permis de bien connaitre la différence entre le bien et le mal, il a connu la République de Weimar et avait de très bonnes notions de ce qu'est la justice et la démocratie."

J'ai donc interrompu momentanément la lecture du livre pour visionner ce documentaire qui me faisait revisiter avec ces 3 personnages une bonne partie des lieux où se sont produits les tragiques événements décrits dans la première partie du livre.

Le documentaire intitulé WHAT OUR FATHERS DID: A NAZI LEGACY est assez poignant.

Tout est dans le titre:  CE QUE NOS PÈRES ONT FAIT. L'HÉRITAGE NAZI

En voici la bande annonce.

Le documentaire est accessible dans son intégralité sur youtube mais, malheureusement l'image est volontairement piquetée...Les sous-titres anglais permettent malgré tout pour les non-anglophones de suivre les échanges toujours respectueux, mais parfois assez durs, entre les 3 protagonistes.

Evidemment j'ai regardé ce doumentaire en étant scotché du début à la fin car j'y voyais les lieux exacts décrits dans le bouquin, mais aussi parce qu'il y avait quelque chose de réellement touchant dans l'attitude de Horst. Au début il m'agaçait un peu mais au fur et à mesure je comprenais mieux son point de vue (sans toutefois y adhérer)...C'est l'attitude d'un petit garçon qui dit que ce portrait qu'on fait de son père n'est pas celui de l'homme qu'il a connu. Horst raconte qu'il n'a jamais entendu son père dire du mal des juifs à la maison, qu'il ne l'a jamais entendu inculquer de la haine à ses enfants ou à son épouse...

Nous voilà plongés au coeur de la problématique du Mal. Otto Von Wächter était aussi un bon père, et son épouse Charlotte, elle-même nazie convaincue, l'aimait passionnément.

Je vous livre ci-dessous une très bonne critique du documentaire de David Evans.

A noter à la fin de ce documentaire une scène assez édifiante, en relation avec l'actualité et les événements de Maidan. On voit des nostalgiques ukrainiens qui arborent des symboles nazis lors d'un enterrement et qui rendent hommage à Horst. Ils lui disent que son père avait été quelqu'un de bien...Une scène hallucinante qui remplit d'indignation Niklas qui ne peut s'empêcher de leur répondre de manière très véhémente: " Vous devriez avoir honte !".

 

A la fin du documentaire Niklas a des propos assez durs envers Horst. Et celui-ci, profondément blessé, va se sentir obligé de faire un geste supplémentaire vis-à-vis de Philippe Sands pour lui montrer sa bonne foi. Horst va mettre à disposition de Sands toute la nombreuse correspondance de sa mère avec son père. Une correspondance très nourrie, un matériel volumineux qui demandera même à Sands l'aide d'une équipe de travail pour traiter toute cette information. C'est la deuxième partie du livre LA FILIÈRE.

Ces documents livrés par Horst  permettront à Sands de reconstituer l'itinéraire d'Otto durant sa fuite et les complicités dont il aura besoin: ex-nazis devenu agents de la CIA, évêques haut placés au Vatican où il finira par trouver la mort dans une clinique. Sands enquêtera sur les circonstances de la mort d'Otto car Horst est convaincu que son père a été empoisonné.

L'intérêt de cette histoire très particulière est aussi de nous en apprendre beaucoup sur l'histoire avec un grand H. Otto Von Wächter et son épouse Charlotte ont été constamment en rapport avec des personnages de premier rang, mais aussi des artistes, des grands compositeurs, des écrivains comme , par exemple, Curzio Malaparte. C'est une plongée au coeur de l'Europe au moment de la montée du fascisme, puis de la 2ème guerre mondiale puis de la chasse aux nazis à la libération  Quand on tourne la dernière page du livre on est saisi d'un énorme vertige.

 

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26 novembre 2021 5 26 /11 /novembre /2021 19:43

Bonjour les amis.

J'ai terminé la semaine dernière la lecture d'un pavé de 1100 pages de Chris Kraus intitulé LA FABRIQUE DES SALAUDS.

Il m'est  vraiment assez difficile de résumer un roman d'une telle envergure et je préfère partager avec vous un excellent article de Mélanie Talcott qui en parle très bien.

Alors, ce roman m'a vraiment donné du fil à retordre. D'abord je me suis rendu compte que je ne connaissais pas bien l'histoire de l' Allemagne d'après-guerre, et encore moins celle des pays baltes. Donc j'ai souvent interrompu ma lecture pour aller vérifier sur internet certains des événements narrés dans ce livre et aussi pour lire la biographie de certains personnages.

Même si certains épisodes nous paraissent complètement insensés, il est clair que l'auteur s'est très bien documenté et qu'il n' y a pas de contre-vérités dans ce livre.On croyait tout savoir sur cette époque mais Chris Kraus nous en apprend des vertes et des pas mûres.

La facilité avec laquelle nombre de nazis se sont reconvertis auprès des occidentaux est vraiment déconcertante, mais le roman explique bien pourquoi, en temps de guerre froide, les services secrets occidentaux ont offert une telle protection à certains anciens SS (mais Kraus ne justifie jamais ce cynisme).

Par ailleurs Koja, le personnage principal, est vraiment perturbant car c'est à la fois un peintre doué d'une grande sensibilité et qui a une parfaite conscience du Mal, mais ça ne l'empêchera pas dans certaines circonstances de participer lui-même à des actions répugnantes quand il s'y verra obligé. Ses histoires d'amour aussi sont perturbantes. Il lui arrive parfois d'être grand seigneur, profondément respectueux et fidèle (se sacrifiant lui-même), et parfois on est estomaqué par son cynisme ou son culot.

Plus d'une fois Koja m'a tellement agacé que j'ai rejeté le livre, mais, une fois ma colère passée, je l'ai repris patiemment car Koja me captivait aussi à travers ses contradictions terriblement humaines. Il tient à tout raconter dans le détail au hippie qui est son voisin de chambre sans rechercher à aucun moment son absolution. Le pauvre hippie en question en entend plus qu'il n' en peut supporter mais il ne peut se soustraire à la volonté de Koja qui l'a choisi comme dépositaire de son histoire. Koja témoigne et n'est jamais complaisant avec lui-même. 

Contrairement à ce que laisse sous-entendre Mélanie Malcott je trouve que l'auteur n'essaie jamais de justifier le Mal. Simplement il l'observe aussi chez des personnes qui, par ailleurs, possèdent une vraie sensibilité.

Ce livre est aussi une oeuvre assez courageuse car il semblerait que l'auteur se soit directement inspiré de personnes de sa propre famille (comme le personnage de Hub, frère de Koja).

Je n'ai pas aimé le titre français qui me paraît bien trop réducteur. Le titre original allemand DAS KALD BLUT (le sang froid) n'est pas terrible non plus. En Italie, ils ont proposé comme titre  I FIGLI DELLA FURIA ( les enfants de la fureur) qui me paraît coller davantage à cette oeuvre.

Quoiqu'il en soit le grand thème récurrent de ce livre c'est la banalité du Mal, cette banalité qui obséda la philosophe Hannah Arendt toute sa vie.

Le ton de l'auteur surprend car il n'hésite pas à narrer des événements tragiques sur ton de la farce, de la dérision et avec parfois un humour noir assez féroce (on pense parfois au Candide de Voltaire et à la manière avec laquelle il traversait les horreurs de son époque).

Enfin ce gros livre est aussi un monument littéraire très bien écrit (rythme, descriptions soignées, dialogues époustouflants, et il y a aussi certaines réflexions profondes de Koja sur lesquelles le lecteur prend le temps de s'arrêter). 

Le roman m'a tenu en haleine jusqu'à la dernière page (la fin est imprévisible, jubilatoire et féroce). J'en suis sorti rincé, vidé, écoeuré aussi... et, vous n'allez pas le croire mais, après avoir subi cette tornade de sentiments contradictoires j'ai été tenté de reprendre l'histoire au début et de la relire...

Aurais-je été, pour la première fois de ma vie, un lecteur développant un syndrome de Stockolm envers un personnage de roman?

 

 

 

 

La fabrique des salauds...ou la banalité du Mal.

Voici 3 extraits du roman.

...Elle souriait avec tant d'amertume que ce n'était même plus un sourire, et, pour le reste de la soirée, elle employa un ton méprisant et accusateur qui n'était à moitié gentil que dans les aigus (mais elle n'était de toute façon plus capable de gazouiller comme autrefois, sa langue de rossignol avait été arrachée et remplacée par un organe reptilien, excessivement fourchu, qui risquait de vous empoisonner à coups de remarques perfides). Elle cracha dans ses mains, et, faute de récupérer la scie, se mit en quête d'une autre occupation. Je ne pouvais rien pour elle, c'était un animal blessé à mort qui devait tenir sur ses jambes sans qu'on l'aide, sous peine de mordre ceux qui accouraient à son secours...

...Je sortis docilement mon carnet de croquis de la poche de mon uniforme, pris un crayon et commençai par les yeux. Il faut toujours commencer par là : beaucoup de gens qui ne savent pas dessiner croient à tort qu’on peut commencer par les traits du visage ou par le nez, alors que c’est le début de la fin. Je dessinai des yeux de hyène, car Himmler avait un rire de hyène, un rire perçant qui s’arrêtait net. Il avait de minuscules dents, mais ces dernières allaient devoir attendre. Sous les yeux, je plaçai un groin, un beau groin de cochon, et sous le groin, une moustache, et sous la moustache, une gueule ouverte et toute tordue, comme un museau de vache, dont je fis sortir un peu de foin. Pas de menton pour Himmler, car il n’en avait pas, les oreilles devinrent celles d’un ouistiti, et pour finir, au moment de choisir la silhouette, après avoir hésité entre la carpe et l’hippopotame, je me décidai pour le bon vieux porc domestique, avec ses grosses bajoues... 

...Dès dix-neuf quarante-sept, l’organisation juive clandestine Hagana employa des centaines d’armes à feu en provenance des réserves du général Rommel, acheminées à dos de chameau par le Sinaï jusqu’en Palestine. 
Un an plus tard, juste avant le début de la guerre d’indépendance, les Israéliens achetèrent à Prague vingt-cinq des avions Messerschmitt fabriqués pour la Luftwaffe dans les usines Avia, recouvrirent les croix gammées d’étoiles de David et, dans la bonne tradition Messerschmitt, allèrent canarder les Spitfires ennemis (repeints à l’égyptienne). 
Durant les combats acharnés contre la Jordanie, la Syrie, le Liban et les royaumes d’Irak et d’Égypte, des MG42, qu’on appelait aussi « tronçonneuses de Hitler », furent importés en fraude du sud de la France jusqu’en Israël. 
Des pistolets Heckler & Koch furent fournis en masse par les familles de la mafia sicilienne. 
Chez des marchands de canons grecs, on trouva des MP40 en quantité non négligeable. 
En bref : les armes allemandes empêchèrent la défaite des forces israéliennes... 

Chris Kraus

Chris Kraus

PS: En marge de ce livre et du sujet traité il se trouve qu'en Espagne un film intitulé EL SUSTITUTO (Le remplaçant) a été présenté le mois dernier. Ce film dont l'action se situe en 1982 (7 ans après la mort de Franco) parle des réfugiés nazis qui ont été protégés sous le régime franquiste. L'action se situe à Denia, très près de chez moi. Je savais par mon beau-père que notre canton avait servi de refuge à des criminels nazis en fuite. Voici la bande-annonce.

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22 août 2019 4 22 /08 /août /2019 11:04

Bonjour les amis,

Dans le sud-est de l'Espagne la reconquête du pays par les chrétiens donne lieu chaque année à des célébrations de commémoration.

Vous trouverez une explication de l'histoire de ces fêtes sur le lien ci-dessous.

Pour que vous vous fassiez une idée voici une vidéo de ces fêtes à Denia cette année...le défilé a duré de l'ordre de 3 heures....Parades, défilés, musiques, chorégraphies, cavalcades... le spectacle était complet.

Quant à moi cette année je suis allé voir le défilé de Vergel, une bourgade voisine de quelques milliers d'habitants. Je vous invite  à jeter un coup d'oeil sur le reportage photo d'une amie...

Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...
Les maures et les chrétiens de Denia et de Vergel de cette année...

Et bien j'ai été ébloui par l'entrée des maures et des chrétiens à Vergel. Cette petite ville a su organiser plus de 2 heures de défilé...Le reportage est incomplet. Il y a eu de belles scènes un peu magiques de théâtre de rue, et aussi de très belles cavalcades avec des cavaliers faisant des allers et retours avec leurs chevaux et les faisant se cabrer sous les yeux des spectateurs...

Il faut noter que les costumes et maquillages ont évolué dans le temps et qu'ils font de plus en plus appel à l'imaginaire plus qu'à la réalité historique, un peu comme l'armée du roi perse Xerxès dans la BD de Frank Miller intitulée 300.

Certains costumes et maquillages baroques s'inspirent d'une esthétique qui pourrait être qualifiée d'Heroic Fantasy...Du côté des chrétiens ça  fait un peu penser à "Conan le Barbare"...Du côté des maures c'est plus poétique et plus inspiré par les contes des mille et une nuits...J'ai adoré.

 

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