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12 février 2024 1 12 /02 /février /2024 12:59

Bonjour les amis,

Samedi dernier s'est tenue à Valladolid la cérémonie des Goyas, équivalent espagnol des Césars.

Cette cérémonie a été marquée par l'affaire Carlos Vermut dont je vous avais déjà parlé antérieurement sur le lien ci-dessous.

http://alea-jacta-est-ex-posteur.over-blog.com/2024/01/qaund-la-vague-mee-too-eclabousse-egalement-le-cine-espagnol.html

Voici maintenant sur l'article ci-joint un petit résumé de cette soirée de samedi dernier.

 

 

Durant cette soirée de Gala il s'est produit un moment assez lunaire. Pedro Almodóvar s'en est pris sur scène à un représentant élu de l'extrême-droite (membre du parti VOX) qui était dans la salle et qui avait accusé le gouvernement espagnol de subventionner des "señoritos" produisant des films de mauvaise qualité que personne ne va voir. " Señoritos" signifiant ici "personnes privilégiées qui vivent un peu dans un autre monde".

Donc voici notre Pedro qui se lance dans une harangue devant un public conquis d'artistes contestataires (pardon pour le pléonasme), un Pedro qui  transforme la cérémonie en meeting politique et qui explique que l'argent reçu par les cinéastes est rendu à l'Etat, entre autres, grâce à la fiscalité à laquelle ils se soumettent.

Alors moi aussi je suis grosso-modo d'accord avec lui et je pense que si la culture n'est pas subventionnée en Europe elle meurt tout simplement.

Rien à redire sur le fond donc, sauf que Almodóvar est sacrément gonflé de tenir un tel discours vu que lui, il a été pris en 2016 dans l'affaire du scandale des Panama Papers et qu'il possédait une société offshore qui lui permettait de frauder le fisc espagnol.

Résumons-nous. Je suis d'accord avec les propos d'Almodóvar sauf que lui, c'était bien la dernière personne de l'assemblée qui avait le droit moral de les exprimer.

je vous mets ce moment assez lunaire sur la vidéo ci-dessous. C'est à 1 minute 15 secondes....avec tout le public "amnésique" qui applaudit comme des pingouins...

Je vous traduis la phrase qu'il prononce à 1 minute 20 secondes:

"Este dinero que recibimos lo devolvemos con creces al Estado"

"Cet argent qu'on reçoit on le rend, amplement et de loin, à l'Etat"

Michel Audiard disait que le cons ça ose tout, mais il n'y a pas qu'eux ! La gauche bobo aussi...

Cette intervention très déplacée d'Almodóvar qui m'a fait mourir de rire illustre à la perfection la supériorité morale que s'arrogent les "wonderful people" de la gauche espagnole.

Les voilà dans toute leur splendeur ceux qui donnent des leçons, qui adorent se faire passer pour des personnes magnifiques, ceux qui prônent la vertu mais qui se gardent bien de la pratiquer en donnant le bon exemple à leurs concitoyens.

Alors, je ne donnerai pas de noms, mais je crois bien qu'en France vous avez vous aussi de beaux spécimens d'artistes de cet acabit. Ceux qui vous expliquent ce que vous devriez penser, ce que vous devriez faire, pour qui vous devriez voter mais qui s'en vont vivre sous d'autres cieux suisses, ou  hollywoodiens, ou alors en France mais dans des municipalités hyper bourgeoises complètement coupées  du petit peuple et de ses misères.

Les voilà donc une fois de plus ces artistes qui traitent les gens qui disent "stop à l'immigration massive" de "fascistes" mais qui vivent eux-mêmes dans des quartiers huppés, hyper protégés, dans lesquels la présence immigrée est pourchassée et rejetée. 

Je terminerai en disant que ce faux-pas de Pedro Almodóvar ne m'empêchera pas de continuer de voir ses films et de considérer que c'est un grand cinéaste qui a beaucoup apporté à la culture espagnole et à son rayonnement dans le monde.

Disons que sur ce coup-là il a vraiment tendu le bâton pour se faire battre et qu'il mérite une petite leçon de modestie.

Et puis j'ai parlé aujourd'hui d'Almodóvar surtout parce que, malheureusement, il est loin d'être le seul à tomber dans le genre de travers que je dénonce. 

Cette supériorité morale de la gauche bobo...pffff !!!! Ras le bol !

PS: J'ai dit que le public de la salle était amnésique mais ce n'est pas le cas des médias espagnols qui ont saisi la balle au bond et qui ont rappelé à Almodóvar ses propres "errements" du passé. Encore une fois c'est la presse de droite et d'extrême-droite qui a épinglé le réalisateur...La presse de gauche, quant à elle, a ses "pudeurs" et a préféré faire la sourde oreille, ce que l'électeur de gauche que je suis trouve assez lamentable...

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15 février 2022 2 15 /02 /février /2022 07:01

Bonjour les amis,

Samedi dernier a eu lieu en Espagne la cérémonie des GOYAS (équivalent des Césars français) qui a vu le triomphe de EL BUEN PATRÓN de Fernando León de Aranoa, un réalisateur qui s'était illustré en 2001 avec son  drame social acclamé LES LUNDIS AU SOLEIL que je n'ai pas vu (mais que je vais voir bientôt).

EL BUEN PATRÓN (Le bon patron) a obtenu le Goya du meilleur film espagnol et aussi celui de la meilleure révélation de l'année pour Almudena Amor. Par ailleurs Javier Bardem est nommé aux Oscars pour son interprétation du rôle principal.

Voici le synopsis:

Julio Blanco est le propriétaire charismatique d'une entreprise qui fabrique des balances industrielles dans une ville de province en Espagne. Ses employés et lui attendent la visite imminente d’un comité qui décidera de l’obtention d’un prix local d’excellence. Tout se doit d’être parfait mais le sort semble s’acharner sur Blanco…

EL BUEN PATRÓN...une satire sociale très grinçante.

Dans ce film Julio Blanco (Javier Bardem) est le patron de sa boîte, le big boss, ce que les espagnols appellent "el puto amo"  et les américains "The fuckin' master of the universe" !

Il est très paternaliste, contrôle tout, est derrière tout. Il n'hésite pas à s'immiscer dans la vie très privée de ses employés s'il pense que les intérêts de son entreprise sont en jeu.

Blanco est tellement conscient d'accomplir ce qu'il a décidé d'être que ça en devient parfois grotesque mais aussi effrayant.

To be or not to be a big boss !

La force du film c'est qu'à chaque fois qu'on pense que Blanco pousse le bouchon trop loin, qu'il en fait trop, à chaque qu'on croit qu'il va se ressaisir il rebondit et va toujours plus loin. Blanco ne doute jamais de son bon droit ni de sa morale liée à la bonne santé de son entreprise.

Il se compare parfois à un chirugien qui doit amputer un membre à un patient : c'est très désagréable mais quelqu'un doit prendre la responsabilité de le faire pour le bien de tous.

Le film est espagnol mais le fait que Blanco dirige une entreprise qui fabrique des balances m'a évidemment fait penser à notre Nanard national (paix à son âme) qui avait repris Terraillon et dont les méthodes étaient parfois très proches de celles de Blanco.

Le thème de la balance est très bien utilisé dans le film comme une métaphore d'un monde idéal qui chercherait à être équilibré, fidèle et juste, comme les trois qualités techniques de toute bonne balance, sauf que dans le monde réel c'est tout l'exact contraire qui se produit.

Le scénario est très bien travaillé, de manière ingénieuse, avec toute une gallerie de personnages qui participent à un énorme jeu de massacre dont très peu sortiront indemnes: ni le  big boss avec sa conscience à géométrie très variable, ni certains travailleurs cyniques qui savent jouer sur le manque de conscience du boss, ni la classe politique, ni la presse, etc...

Mais il faut vraiment saluer la performance de Bardem qui est énorme dans ce film, comme s'il avait été patron toute sa vie.

Il nous surprend tout le temps, sait jouer de mille registres, de mille facettes. Il est roublard, il a de l'humour, il est drôle, très démago et sait surfer sur les modes de son époque pour s'attirer la sympathie des gens.

La manière, par exemple, avec laquelle il utilise le phénomène  #Me too#  pour faire pression sur l'un de ses employés est tout simplement ignoble. Il lui donne une leçon de morale et de bon comportement avec les femmes alors que lui-même n'a pas le nez propre. Il lui rend service mais avec une terrible menace à la clé s'il ne suit pas ses injonctions.

Il y a aussi sa façon hypocrite d'intégrer les travailleurs immigrés maghrébins qu'il considère comme ses fils adoptifs et de jouer la carte de l'interculturalité.

Ses relations avec les femmes sont très opportunistes. Son discours féministe d'un côté...et ses actes et son cynisme de l'autre...Mais son cynisme aura affaire à plus cynique que lui, comme une espèce d'antimoralisme dans l'amoralisme, par effet boomerang.

Almudena Amor, jeune révélation dont la présence illumine le film...
Almudena Amor, jeune révélation dont la présence illumine le film...

Almudena Amor, jeune révélation dont la présence illumine le film...

Le film surprend aussi parfois car il nous fait passer de scènes de comédie à hurler de rire à d'autres bien plus dramatiques. Ces différences de registre parfaitement voulues par le metteur en scène surprennent mais se justifient: malgré certains drames, la comédie de la vie continue comme dans la réalité.

La scène finale surprendra et elle est tout simplement magistrale et donne à ce film tout son sens profond.

On revient au thème de la balance...Va t'elle basculer ? Je vous laisse découvrir ça par vous-mêmes.

Bardem fait vraiment très fort dans ce film: il arrive à donner à son personnage une dimension quasi métaphysique puisqu'il est parfaitement conscient de ce qu'il est, et de ce qu'il fait. Il joue sur les sentiments, sur l'humain (tout comme le faisait Bernard Tapie). Il est comme le menteur qui se prend au jeu de ses propres mensonges. Blanco aime rendre spontanément service à tous ses employés mais en même temps il crée de la dette morale envers ceux qu'il aide, une dette dont il sait bien profiter par la suite. On se sait jamais où est la part de vrai et la part de faux dans ses relations avec les autres. C'est quelqu'un de perturbant car il sait être sympa.

Julio Blanco manipule disais-je mais il y a un thème sur lequel il ne ment pas, sur lequel il est sincère à 100%, c'est son obsession constante pour maintenir la prospérité de son entreprise et sa bonne image.

La fin justifie toujours les moyens.

Le pire c'est qu'on ne peut s'empêcher d'avoir de la sympathie pour Blanco. On a envie que les choses tournent bien pour lui et pour le bien de sa boîte malgré sa manière de manoeuvrer les personnes pour en obtenir ce qu'il désire. 

Personne ne sort indemne de cette comédie, disais-je, y compris le spectateur et sa sympathie coupable pour Blanco.

Je finirai en disant que la fable grinçante se transforme aussi en métaphore universelle et que l'entreprise de Blanco est également une allégorie de la société toute entière.

 

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