Bonjour les amis,
La semaine dernière, pendant mon cours de maths en classe de première, une de mes élèves m'a interrompu pour me demander de lui expliquer ce qu'était la géométrie fractale.
Je ne suis pas certain que sa question était réellement interessée ou si elle avait plutôt pour objet de me faire tchatcher un peu. C'est une technique classique employée par les potaches quand ils ne veulent pas faire d'efforts en classe : essayer de balancer une question au prof en sachant que le sujet lui plaît et qu'il va disserter dessus pendant de très longues minutes.
D'habitude je ne mords pas à l'hameçon mais comme je considérais que cette question passionnante (mais pas au programmme) était vraiment intéressante pour la culture générale de mes élèves, je me suis prêté de bon gré à la question de cette lycéenne. J'ai donc fait un petit topo rapide à l'ensemble de la classe, en leur explicant que cette géométrie qui nécessite des centaines de milliers d'opérations ne pouvait naître qu'avec la puissance de calcul des ordinateurs. J'ai terminé mon bref exposé en faisant un lien entre cette géométrie et la théorie du chaos, en leur explicant qu'un phénomène chaotique est hautement imprévisible puisque, plus on veut gagner en précision plus le problème se recrée et se recomplique.
Si vous ne savez pas ce qu'est une figure fractale regardez la video ci-dessous à 21 minutes exactement. La forme créée se contient en elle-même et vous pouvez agrandir l'image à l'infini elle n'arrête pas de se recréer.
C'est vertigineux...
Il se trouve que cette question improvisée de mon élève élève m'a replongé dans un épisode assez insolite de ma vie personnelle que je n' ai pas évoqué devant ma classe ,mais à vous, mes chers lecteurs et abonnés, je peux bien vous le raconter.
Il y a de cela un certain nombre d'années, et alors que j'étais en vacances avec ma famille en France durant la période de Noël, ma mère, un soir, avait décidé de nous préparer des lasagnes.
A 19 heures, ma mère avait déjà cuisiné sa sauce bolognaise mais il lui manquait encore quelques ingrédients pour le repas.
Comme elle était un peu à la bourre, elle m'a demandé si je pouvais aller à sa place à Auchan, à Aulnoye-les-Valenciennes, pour aller acheter les quelques produits alimentaires qui lui manquaient (prosciutto, parmesan, etc...).
Bien évidemment je lui ai répondu qu' il n'y avait aucun problème et donc je suis allé au supermarché qui se trouve à 20 minutes en voiture de la maison familiale. J'ai acheté les quelques produits qu'elle m'avait indiqués mais avant d'aller à la caisse j'ai décidé de passer rapidement devant le tout petit rayon librairie du supermarché.
En général quand je fais un séjour en France j'en profite toujours pour faire les librairies, et donc, même à Auchan je jette un coup d' oeil sur les livres en rayons. Je fais ça machinalement tout en me doutant bien qu'il y a peu de chance que j'y trouve un bouquin qui m'intéresse.
Mais ce jour-là, et à ma grande surprise, je suis tombé sur 2 livres côte à côte qui ne font pas partie des lectures habituelles proposées aux clients du supermarché. L'un d' entre eux s'intitulait LES OBJETS FRACTALS du mathématicien Benoît Mandelbrot, et l'autre LA THEORIE DU CHAOS, un ouvrage de vulgarisation écrit par le journaliste scientifique américain James Gleick.
Je ne connaissais pas l'existence de ces livres et je les ai achetés les yeux fermés.
Quand je suis rentré en Espagne, j'ai dévoré ces deux bouquins qui sont passionnants, et fondamentaux pour ceux qui veulent appréhender un peu mieux la nature du chaos.
Quelques mois plus tard, je me suis présenté à un concours de recrutement de professeurs de mathématiques, et parmi les épreuves que nous devions passer, l'une d' entre elles consistait en un exposé sur un thème imposé et tiré au sort devant les candidats.
Et le thème fut : ... LES OBJETS FRACTALS !
Mon coeur ne fit qu'un bond dans ma poitrine. Quelle chance !
Alors, après avoir lu le bouquin du mathématicien belge Benoît Mandelbrot qui est le père du concept même de figure fractale, j'aime autant vous dire que j' ai cartonné dans cette épreuve...Lors d'un concours, il faut faire la différence avec les autres candidats. Il ne s'agit pas simplement d'assurer. En l'ocurrence , il fallait être dans les 30 premiers de 2000 postulants.
Donc, bien évidemment les deux lectures récentes m'avaient permis de rédiger un exposé très complet et bien documenté. 5 jours plus tard quand j'ai lu mon travail devant les membres de mon tribunal, j'ai senti à travers leurs regards approbateurs que j'avais conquis mon auditoire.
Alors, maintenant rebobinons le film.
Quelle était la probabilité que ce sujet tombe au concours ? ...assez faible.
Quelle était la probabilité que ma maman m'envoie faire des courses dans un Auchan dans lequel il y aurait justement 2 livres qui auraient un rapport avec le sujet de mathématiques TRES SPÉCIFIQUE qui est tombé 6 mois plus tard ?....
Là, je ne peux m'empêcher de sourire.
Ces deux livres qui ne sont pas franchement grand public mais plutôt destinés à des étudiants de carrières scientifiques se trouvaient de manière tout à fait inhabiltuelle dans un rayon d'hypermarché.
Alors, mes chers amis, bien évidemment, nombre d'entre vous penseront que j' ai eu de la chance ce jour-là (et je le pense moi-aussi...).
Finalement mon anecdote pourrait presque être une illustration de la théorie du chaos et un exemple d'effet papillon (à savoir qu'une cause insignifiante finit par avoir pour moi un effet de première magnitude).
Oui, mais parfois la chance n' est pas si aléatoire que ça.
Ce n'est pas un hasard si j'ai acheté ces 2 livres. Je ne l'ai pas fait en pensant que je passerais un concours 6 mois plus tard. Non, je les ai achetés car le sujet m' interessait, parce que j'étais curieux...et là, il n'y avait aucun hasard.
La chance a récompensé mon intérêt réel pour la matière que je voulais enseigner.
Quant à ma maman, elle était loin d'imaginer qu'en envoyant son fils acheter du jambon et du parmesan à Auchan, elle lui filait un sérieux coup de pouce dans sa carrière professionnelle...
Les mamans sont merveilleuses. Elles arrivent parfois à être encore protectrices, même si c'est de manière providentielle, alors que nous avons déjà largement dépassé l'âge de notre majorité.
Quant au plat de lasagnes, il était tout simplement délicieux, mais encore une fois, il n' y avait aucun hasard là-dedans.