Bonjour les amis,
Je vous avais informé il y a quelques semaines de cela de la tentative du Président de la Catalogne Artur MAS d' organiser un référendum pour demander à ses concitoyens s' ils désiraient former oui ou non une nation séparée du reste de l' Espagne.
Cette consultation prévue pour le 9 Novembre prochain a été annulée sur demande du gouvernement de Mariano Rajoy par le tribunal constitutionnel qui a considéré qu' elle enfreignait 4 points de la Constitution Espagnole.Pour l' instant les catalans ne peuvent décider eux-seuls de cette question et le président MAS a pris acte.
Rajoy a donc gagné la première manche de son bras de fer contre le gouvernement régional d' Artur MAS, mais force est de constater qu' il n' a gagné que du temps, et que le problème posé reste entier.
Pis, cette fin de non-recevoir des autorités centrales n' a fait qu' accroître la frustration, le sentiment de mépris et la force du camp indépendantiste.
Artur MAS a donc décidé de riposter en 2 temps.Voici son plan B :
1. D' abord, il va maintenir pour le 9 Novembre une consultation qui n' aura aucun caractère institutionnel.Ce sera comme une grande enquête réalisée auprès des citoyens, avec des urnes mises à dispositions par des milliers de " volontaires", et théoriquement, je dis bien théoriquement, pas par des fonctionnaires.Participeront à ce scrutin que ceux qui désirent s' y exprimer et l' idée, telle que je la comprends est de renvoyer à Madrid une réponse citoyenne forte sur la volonté du peuple catalan de décider par lui-même de son propre futur au sein de l' Etat Espagnol.Disons que ce sera une méga-enquête d' opinion destinée à montrer les biceps.On peut s' attendre à un score sans appel car 80% des catalans désirent voter et décider de leur avenir.
2. Organiser des élections régionales en début d' année prochaine où tous les partis prendraient position sur la question référendaire.L' idée est donc de transformer les élections des députés régionaux en plébiscite...de les détourner de leur fonction première et de les transformer en référendum indirect car si les 4 partis en faveur d' une consultation obtiennent une large majorité, ils seront légitimés pour ensuite forcer l' Etat central à accéder à leur volonté...Notons que l' un des partis ERC ( Esquerra Republicana de Catalunya dirigé par Oriol JUnquera) avait déjà appellé dans un premier temps à la désobéissance civile après le refus imposé par le tribunal constitutionnel au sujet du 9 Novembre .
La situation est donc des plus préoccupantes pour Mariano Rajoy qui n' a jamais essayé durant son mandat de lancer des négociations avec les indépendantistes.Rajoy utilise la constitution comme un paravent, et dans un premier temps cette stratégie a été efficace mais elle se révèle très risquée à long terme car elle ne fait que renforcer sur le terrain le sentiment indépendantiste et n' offre aucune sortie à la crise.
Le Parti Socialiste espagnol lui, conscient de l' énorme risque séparatiste propose de faire évoluer la constitution vers un régime fédéral pour maintenir la Catalogne au sein de la communauté nationale.C' est un choix discutable mais pragmatique qui part de la réalité objective actuelle de certaines régions à fortes revendications identitaires.
Rajoy, pour l' instant n' apparaît pas comme un fin stratège...c' est la politique du quitte ou double...il mise tout sur un seul cheval : la constitution inamovible et sacrée brandie comme les tables de la loi en seul et unique rempart et bouclier.
Or, les espagnols savent parfaitement que la constitution peut être modifiée du jour au lendemain sur un claquement de doigts s' il y a une vraie volonté politique.Ça a été le cas sous Zapatero quand la Troika a demandé à l' Espagne de modifier l' un des articles pour mettre le remboursement de la dette comme une priorité de l' Etat,au dessus du bien commun ou de l' intérêt des simples citoyens...
La sensation aujourd' hui est donc d' assister à un long bras de fer qui va peu à peu monter en puissance et augmenter de manière très significative les tensions entre Madrid et Barcelone.
L' impression est aussi que chaque camp a besoin de l' intransigeance de l' autre.Le NO de Rajoy et son refus du dialogue c' est du pain béni pour les indépendantistes, et finalement ceux-ci ne seraient probablement jamais arrivés aussi loin sans cette politique de la chaise vide.Rajoy fait un refus d' obstacle et ne veut pas prendre le même risque politique que celui de Cameron avec l' Ecosse.
Il n' y a pas en ce moment de débat politique public et contradictoire entre responsables.A la télévision le seul qui a réussi à asseoir l' ex-président Felipe Gonzalez avec Artur Mas, c' est Jordi Evole dans son programme SALVADOS sur la chaîne SEXTA.
Enfin, je parlerai en tant que témoin qui vit dans la région voisine de Valencia,un témoin qui a des amis dans les deux camps, des vrais amis que je respecte et dont les options sont irréconciliables, et l' impression que j' ai c' est qu' il est trop tard pour arriver à une sortie négociée de la crise.Mon sentiment c' est qu' en gagnant la première manche, Rajoy a perdu la deuxième et qu' il n' y aura pas de paix sociale en Catalogne tant que le référendum ne sera pas à l' ordre du jour.
Artur MAS, même si son parti CIU est très affaibli par l' énorme scandale des malversations financières de la Famille de l' ex-président Jordi Pujol, a réussi à créer une énorme attente au sein de la société catalane qui ne veut plus rien savoir de Madrid tant que la question référendaire ne sera pas à l' ordre du jour.Le référendum est devenu une sorte de point de passage obligé.
En attendant, le bras de fer est lancé et bien lancé...2 ème manche en Novembre prochain ( je vous tiendrai au courant), et avec une 3 ème manche à la clé au printemps où commenceront vraiment les hostilités, les grandes manoeuvres.