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29 décembre 2024 7 29 /12 /décembre /2024 12:38

Bonjour les amis,

Cette semaine j'ai lu un court essai instructif et intéressant de Michel Nieva, jeune écrivain argentin, intitulé LA SCIENCE-FICTION CAPITALISTE.

Cet essai est publié dans l'édition française à la fin d'un roman intitulé L'ENFANCE DU MONDE.

 

Quand la science-fiction alimente le discours capitaliste écocidaire...

Voici une traduction de la présentation du livre de Nieva par son éditeur espagnol.

Science-fiction capitaliste ou comment les milliardaires nous sauveront de la fin du monde
Michael Nieva
Critique politique et revendication littéraire dans un essai qui met en lumière les liens pervers entre science-fiction et capitalisme.

Le capitalisme technologique promu par Bezos, Musk et Zuckerberg, avec leurs voyages interplanétaires et leurs rêves d’immortalité, est un récit séduisant qui s’est approprié le langage de la science-fiction pour spéculer sur un futur supposément meilleur. La science-fiction capitaliste est devenue le récit fantastique d’une « humanité sans monde », de touristes parcourant le cosmos prenant des selfies pendant que la Terre prend feu.
Cet essai, qui revendique la littérature et fait une critique politique de l’esthétisation technologique, nous montre les liens pervers qui existent entre la science-fiction et l’histoire du capitalisme.

Voici maintenant une vidéo qui illustre bien certains des propos de Nieva.

Dans son essai Michel Nieva est allé rechercher les auteurs et les oeuvres de SF qui ont inspiré les magnats de nos grandes industries. Par exemple, quand en 2021 Mark Zuckerberg a annoncé son intention de convertir Facebook, Instagram et WhatsApp en une plateforme de réalité virtuelle appelée « metaverse », cette annonce a fait grand bruit dans l’opinion publique, sans que soit vraiment commenté le fait que Zuckerberg et son équipe ont pris ce concept de « métavers » dans un roman de science-fiction : LE SAMOURAÏ VIRTUEL, de Neal Stephenson. C'est l'un des nombreux exemples d'emprunts à la SF qu'on pourra trouver dans le livre de Nieva.

Une autre caractéristique de la science-fiction capitaliste est la confiance aveugle en la technologie pour construire miraculeusement une utopie libertaire et écologiste, sur cette planète et sur d’autres. C’est ce fantasme qui, aux débuts de la Silicon Valley, a nourri le roman ECOTOPIE (paru en1975).

Mais ce qui est frappant et angoissant dans cet essai de Michel Nieva c'est de constater à quel point les grands capitaines d'industrie s'inspirent des écrivains de science-fiction pour prendre à contrepied les politiques de sobriété que nous devrions mettre en place pour tenter de sauver notre environnement.

Par exemple, le réchauffement climatique devient, de manière complètement perverse, un chance pour nos "super-héros" qui vont nous sauver. L'anthropocène qui est un concept qui explique des changements géologiques dramatiques qui sont le fruit de l'activité humaine donne lieu à un nouveau concept de "bon anthropocène", qui cède lui-même la place à l'idée d'un GREAT ANTHROPOCENE, à l'idée d'un formidable défi que nous allons surmonter de manière épique grâce à des technologies supposées propres.

Extrait du livre de Nieva:

"La science-fiction était une fiction « spéculative » dont les compagnies spatiales ont fait une fiction « spéculatrice » avec succès....

"Détail amusant des plans d’occupation de Mars chers à Musk : pour rendre la planète habitable, il faudrait la doter d’une atmosphère, unique moyen de remédier aux températures extrêmement basses, –50 °C en moyenne, ainsi qu’à l’absence d’air respirable et d’eau sous forme liquide – il y en a congelée sous les pôles. Mais le paradoxe est que la seule méthode – à la portée des technologies capitalistes – pour créer une couche atmosphérique qui absorbe les radiations thermiques, réchauffe la planète et fasse fondre les calottes polaires, c’est d’émettre des gaz à effet de serre. C’est-à-dire qu’il faudrait recourir aux mêmes mécanismes qui ont pollué et détruit notre planète...."

Je terminerai avec une vidéo dans laquelle Jean-Marc Jancovici et Philippe Bihouix réfléchissent sur les conséquences des délires muskiens.

Ecoutez Jancovici expliquer (à 1 heure 50 minutes 04 secondes sur la vidéo mise en lien ci-dessous) que le rêve de Musk n'est ni plus ni moins qu'un vrai cauchemar, celui de vivre dans une prison dont personne ne voudrait.

https://www.youtube.com/watch?v=6HB2WD96ByQ

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commentaires

M
Si tu veux des préoccupations écologiques dans la SF, il faut lire Norman Spinrad. Il est très concerné par le réchauffement climatique, surtout dans ses romans les plus récents..<br /> Par exemple dans "Le printemps russe" il décrit un climat chaud en Sibérie. . Il imagine aussi Paris devenu tropical avec des crocodiles dans la Seine.<br /> Tu peux laisser tomber en revanche "Jack Barron et l'éternité", un de ses premiers romans.<br /> Bon après-midi,<br /> Mo
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A
Merci pour ces conseils de lecture. Je n'ai rien lu de lui et il aborde des thèmes qui m'intéressent...Je vais donc, pour commencer, me laisser tenter par son "printemps russe".<br /> Merci l'amie et bon réveillon
C
Dommage qu'il n'ait pas lu "Soleil vert" ou "Planète à gogos"
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A
A mon avis il connaît ces ouvrages mais il préfère les super-héros. Je parlais du personnage du MULET dans la série des fondations d'Asimov qui plaît tant à Elon Musk. Ce n'est pas par hasard que Musk raconte qu'il est autiste (ce qui est loin d'être scientifiquement avéré) mais c'est une façon pour Musk de se voir comme quelqu'un doté d'una autre sensibilité que le commun des mortels, et aussi comme quelqu'un dont la supposée lucidité serait capable aussi de sauver le monde...
R
Souvent, la science fiction dénonce la folie des hommes et là, par un renversement, la science fiction se met au service de leur folie, celle d'Elon Musk et d'autres illuminés... c'est, en tout cas, un ouvrage intéressant... Est-ce que tu as lu aussi le roman qui précède cet essai ?<br /> <br /> Musk vient de faire la promotion de l'ozempic, comme un médicament anti obésité... et pourtant, un médicament qui n'est pas sans risques...<br /> <br /> <br /> https://www.huffingtonpost.fr/life/article/elon-musk-s-affiche-en-fervent-defenseur-du-problematique-ozempic-un-medicament-anti-obesite_244075.html<br /> <br /> <br /> <br /> Belle soirée, AJE
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A
Oui l'ouvrage de Nieva est intéressant car il puise à la source de ce qui alimente l'imaginaire des magnats ( et le nôtre aussi parfois). Moi-même, étant féru de SF, j'ai lu la plupart de ces ouvrages.<br /> Par exemple Elon Musk dit qu'il a adoré la trilogie du cycle des FONDATIONS d'Isaac Asimov. Or, il y a dans cette série un personnage très puissant et vraiment troublant nommé THE MULE (le mulet). C'est un mutant capable d'ajuster les émotions d'autrui, individuellement ou en masse. Il utilise cette capacité pour les convertir à sa cause.<br /> Or, Elon Musk s'est converti en un personnage à la fois puissant et vraiment hors-normes, disposant de la même puissance que certains chefs d'Etat. <br /> Merci pour le lien avec ses voeux de Noël très particuliers promouvant l'usage de l'ozempic pour perdre du poids alors que 2 récentes études démontrent que ce médicament peut provoquer des effets secondaires très graves.<br /> Bonne fin de soirée l'amie<br /> PS: Je n'ai pas encore lu le roman L'ENFANCE DU MONDE mais une chose est sûre. Michel Nieva ne met pas sa plume au service des grands capitalistes de notre planète...<br /> PS nº2: La SF est si variée que chacun peut y trouver des oeuvres au service de sa propre idéologie. Depuis un certain nombre d'années l'extrême-droite françaoise aime citer LE CAMP DES SAINTS de Jean Raspail, en nous expliquant que ce qui était une fiction dans les années 70 est devenu une réalité au XXI ème siècle.<br /> Jean Raspail, lui, se dédend de tout racisme.<br /> https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/le-camp-des-saints-ouvrage-de-reference-de-l-extreme-droite-ce-n-est-pas-un-mode-d-emploi-se-defend-son-auteur_2088657.html
L
Je suis naturellement de nature pessimiste, je ne crois pas par exemple à la pérennité de la démocratie dans le monde, ni à la victoire du monde libre contre l'islamisme radical... L'être humain libre qui a vaincu le nazisme, le fascisme ou le communisme, ne vaincra pas à long terme l'islam radical.<br /> <br /> Mais lorsqu'il s'agit de la conquête de l'espace, je suis transformé, je crois soudain à la survie de l'humanité ailleurs que sur Terre, sur une planète du système solaire, sur l'une ou sur plusieurs de ses lunes... Certes, la vie dans ces conditions extrêmes se cantonnera dans des prisons, comme le dit ton billet, des complexes géants où l'homme visionnaire créera des conditions de vie semblables aux nôtres, avec de l'oxygène, de la verdure, de la gravité artificielle, etc, comme dans les films futuristes... Le pire c'est que j'y crois.<br /> <br /> Je n'en veux même pas à l'être humain d'avoir inventé la bombe atomique, puisque nous en auront besoin pour bombarder des cailloux célestes qui menacent la Terre ou les futurs habitats de l'homme dans l'espace.<br /> <br /> Ce Dieu qui a créé l'homme lui a donné le sens de la survie !
Répondre
L
Je me souviens qu'au lycée, l'un des prêtres-enseignants, visionnaire lui, au début des années 70, nous a dit :<br /> Si la vie existe ailleurs que sur terre, c'est pour que l'homme puisse l'explorer.<br /> La moitié de nos enseignants étaient des prêtres, italiens pour la plupart à cette époque, les salesiens du DonBosco, mon collège-lycée.
A
Merci pour ton témoignage. Je fais moi-même partie des fans de SF (d'ailleurs tous les romans de SF ne vont pas dans le sens souhaité par Musk, Bezos,etc...). Mon imaginaire d'enfant s'est nourri des épopées que nous ont offert la NASA. Mais aujourd'hui je suis devenu beaucoup plus circonspect: au terme de "conquête del'espace" je préfère celui de "DECOUVERTE de l'espace", de sa magie, de sa poésie, de sa beauté (les planètes, les étoiles , les constellations, les amas, etc...).<br /> Mais je garde bien à l'esprit que les planètes de notre système solaire ne pourront pas nous offrir une issue crédible à notre crise planétaire et peut-être même que c'est tant mieux comme ça...Nous avons un véritable défi à relever ici bas et les rêves à la Elon Musk ne peuvent que nous faire perdre un temps précieux (dans le meilleur des cas) ou alors, précipiter notre fin dans le pire...<br />