Le siècle du populisme...

Bonjour les amis,

Je suis plongé dans la lecture d'un ouvrage absolument passionnant  intitulé LE SIÈCLE DU POPULISME, écrit par Pierre Rosanvallon professeur au collège de France.

Il y a une très belle présentation de ce livre que je vous invite à lire sur le lien ci-dessous.

Le siècle du populisme par Pierre Rosanvallon

Le siècle du populisme de Pierre Rosanvallon est un livre de substance qui se situe dans le prolongement des travaux précédents de l'auteur sur l'approfondissement de la démocratie. Pierre ...

https://www.xn--cfdt-retraits-mhb.fr/Le-siecle-du-populisme-par-Pierre-Rosanvallon

Le mérite de ce livre est de nous offrir d'abord une vision historique très complète qui va de la naissance du populisme (qui se décline de différentes manières sur les 5 continents) jusqu'à son essor au XXI ème siècle.

Il nous apprend à bien reconnaître le populisme à travers des indices clairs et bien précis qui ne trompent pas sur sa nature.

Tous les populismes se réclament du peuple. Mais bien évidemment la question qui se pose vite est la propre définition de ce peuple. Rosanvallon en explique bien tous les sens, le peuple pris comme corps civique constitué (celui de la déclaration de la constitution américaine: WE THE PEOPLE), ou peuple entendu comme entité ou catégorie sociale (celui qui prend d'assaut la Bastille).

Pierre Rosanvallon ne présente pas son ouvrage comme un brûlot anti-populiste mais nous invite à mieux  comprendre le phénomène populiste: de quoi il témoigne et de quels besoins non satisfaits il est l'expression.

Malgré tout, et bien qu'il s'en défende, son étude critique à la fin de l'ouvrage confirme  tout le mal que je pense personnellement des populismes, qu'ils soient de droite ou de gauche.

En fait son livre m'aide à mieux approfondir ma réflexion sur ce sujet, en l'élargissant et en me fournissant aussi plus d'arguments que ceux dont je disposais jusque maintenant.

Pour être précis le livre formule aussi des objections personnelles que j'avais parfois du mal à exprimer, notamment à l'époque de l'émergence du mouvement italien CINQUE ESTELLE ( 5 étoiles), un mouvement populiste qui me paraissait très dangereux avec ses idées de démocratie directe via internet (surtout quand on connaît mieux aujourd'hui les méfaits pervers des réseaux sociaux et des fake news).

En conclusion, c'est un livre riche, pas toujours facile à lire, un livre devenu NÉCESSAIRE aujourd'hui qui me permet de mieux penser le populisme de manière plus documentée et plus rigoureuse.

PS: J'ai eu la bonne surprise de découvrir que ce livre est également traduit en espagnol. Donc j'en fais la promotion également dans tout mon entourage direct et sur les réseaux sociaux.

Comments

[caius]

Un article on ne peut plus d'actualité :

ANTI-OTAN ET NOSTALGIQUE DE CEAUÇESCU : VOICI GEORGESCU, LE POPULISTE QUI A SURPRIS LA ROUMANIE
Par Andrea Muratore

Calin Georgescu a véritablement changé la donne au premier tour des élections présidentielles roumaines. L'indépendant de droite a remporté le premier tour avec un peu moins de 23% et s'est qualifié pour le second tour qui le verra défier la candidate conservatrice anti-corruption Elena Lasconi, membre du parti de centre-droit USR (Union pour le salut de la Roumanie), qui a dépassé Marcel Ciolacu, premier ministre sortant du Parti social-démocrate, d’un peu plus de 4000 voix, obtenant la deuxième place avec 19,16 %.

Georgescu est une figure qui ne peut être classée selon les canons politiques occidentaux et, pour simplifier les choses au strict minimum, on pourrait le définir comme un populiste qui, bien sûr, se vevendique comme tel. C'est un parfait exemple de ce nationalisme roumain très fier et identificatoire que tout le monde pensait associé à George Simion, le leader de l'Alliance pour l'Union des Roumains (Aur), quatrième avec 14% des voix, et qui s'est manifesté sous la forme d'un boom du soutien à l'ancien haut responsable de l'ONU.

Georgescu, 62 ans, n'est pas un homme issu du monde anti-système, bien au contraire : agronome, titulaire d'un doctorat en sciences du sol obtenu à Bucarest, il a travaillé comme consultant auprès des gouvernements roumains de droite comme de gauche sur les politiques environnementales et a travaillé pendant 17 ans au sein des Nations Unies. Ces expériences l'ont amené à devenir un expert international en matière de durabilité et de droits de l'homme. Il a travaillé au HCR en tant que rapporteur spécial sur les droits de l'homme de 2010 à 2012, a été président du Centre européen de recherche du Club de Rome, l'un des principaux instituts d'étude du développement durable, de 2013 à 2015 et, entre 2015 et 2016, il a dirigé les bureaux du Global Sustainability Index Institute des Nations Unies entre Genève et Vaduz, la capitale du Liechtenstein.

À première vue, il pourrait être surprenant qu'une personnalité au cursus aussi international et proche des organisations internationales puisse exprimer des positions clivantes en tant que candidat. En 2020, Georgescu a défini comme « héros nationaux » Ion Antonesu, dictateur de la Roumanie allié à l'Axe pendant la Seconde Guerre mondiale et partisan actif de l'Holocauste, et Corneliu Zelea Codreanu, chef du mouvement politique ultranationaliste et réactionnaire des Gardes de Fer, les considérant comme des personnages à travers lesquels « l'histoire nationale a parlé », les opposant aux « laquais des puissances mondialistes qui dirigent temporairement la Roumanie aujourd'hui ». Dans le même temps, il a qualifié la destitution et l'assassinat du dictateur communiste Nicolae Ceaucescu en 1989 de « un coup d'État », désignant la révolution roumaine une illusion de changement vendue au peuple comme un tournant démocratique.

Ces propos sont liés à des questions concrètes : Georgescu critique l'Union européenne et, surtout, l'OTAN, définie comme limitant la souveraineté roumaine. Il s'est opposé au soutien du président sortant Klaus Iohannis à l'Ukraine, a qualifié l'installation de la base de missiles de l'OTAN à Deveselu de "honte diplomatique" et a critiqué les effets de la guerre en termes d'augmentation des prix, d'inflation et de perte de perspectives économiques. Son ascension politique s'inscrit dans la longue vague du populisme anti-inflationniste traditionnel et, remerciant les électeurs qui lui ont apporté trois fois plus de soutien que les sondages, il a déclaré que ceux qui l'ont soutenu avaient fait "une prière pour la nation".

Une Roumanie, celle de Georgescu, qui retrouve son âme profondément nationaliste, conservatrice à droite comme à gauche, hostile au système mondial précisément en raison de son expérience interne, qui l'a amené à considérer que le seul objectif de l'Occident lors de la transition démocratique d’après 1989 visait à « voler nos ressources et asservir notre pays Ce n’était que cela. Tout se jouait sur les ressources. » Il a ajouté qu'il se définit comme "la voix des oubliés", comme il le fait souvent dans ses diffusions en direct sur TikTok qui l'ont rendu célèbre. Maintenant, dans deux semaines, Georgescu sera confronté au défi d'un second tour dans une Roumanie qui s'est nettement déplacée vers la droite. Mais une fois de plus, l’Europe subit un séisme politique venant d’un de ses pays chauds. Et comme en Allemagne de l'Est et en Moldavie, la longue vague de la crise ukrainienne y est pour beaucoup. Ce qui a conduit de nombreuses voix politiques du pays à se radicaliser. Créant une base consensuelle interceptée par la révolte incarnée par Georgescu. Un séisme politique dont l'ampleur n'est pas à sous-estimer.


https://it.insideover.com/nazionalismi/anti-nato-e-nostalgico-di-ceaucescu-ecco-georgescu-il-populista-che-ha-sorpreso-la-romania.html

[alea-jacta-est]

Merci beaucoup Caius.
Voila un candidat dont je ne savais absolument rien. Et son parcours est pour le moins atypique. Avec un tel cursus tout le destinait à avoir un profil plutôt mondialiste, or c'est exactement tout le contraire qui s'est produit...
Quant Fukuyama avait écrit " The End of History and the Last Man " et annonçait "La fin de l'histoire" il n'imaginait sans doute pas l'émergence de personnages comme Calin Georgescu.

[Caius]

Certes mais j'ai le sentiment que le terme « populisme » a été massivement galvaudé par les élites au pouvoir pour stigmatiser et discréditer quiconque n'adhère pas à leurs décisions.

[alea-jacta-est]

Voila ce que j'écrivais en 2013 Caius à propos des 5 étoiles de Beppe Grillo.
Heureusement ses propositions n'ont jamais été adoptées....
http://alea-jacta-est-ex-posteur.over-blog.com/article-internet-est-il-en-train-de-creer-un-court-circuit-democratique-en-europe-115865811.html

Aujourd'hui en 2024 quand on sait à quel point internet est devenu un instrument de manipulation et de désinformations les propositions de Grillo font tout simplement froid dans le dos...

[alea-jacta-est]

Bien sûr il y a une tendance dans les partis traditionnels républicains à taxer de populisme certains adversaires pour les dicréditer. Certains dirigeants affublés de cette étiquette sont "démagos", ils flattent le peuple mais ça n'en fait pas pour autant des populistes.
Ou alors certains partis sont souverainistes mais ne vont pas jusqu'à faire des propositions de modifications de la constitution qui représenteraient un danger pour la démocratie et pour les libertés.
Malgré tout, d'autres leaders cochent toutes les cases du populisme tel qu'il est défini dans le livre de Rosanvallon.
Donc son bouquin me permet d'établir une grille interprétative et de mieux mesurer le degré de populisme de tel ou tel parti., de tel ou tel programme.
Il faut noter que Rosanvallon ne traite pas le populisme comme une maladie moderne de nos démocraties. Pour lui le populisme est le symptôme d'un déficit démocratique.
Or, ce n'est pas ma perception...Je continue de penser que tous les mouvements qui mettent en péril les corps intermédiaires, les assemblées parlementaires, la justice et tous les garde-fous démocratiques dont nous bénéficions sont pour moi aussi dangereux que le fascisme.
Dans mon article je cite le mouvement italien 5 étoiles qui, de mon point de vue, cochait toutes les cases du populisme au moment de son émergence.
Je vous conseille de regarder le lien qu'a partagé Rosemar qui offre une belle synthèse de la pensée de Rosanvallon.
Bonne journée Caius

[LH]

Pour détruire une démocratie vieille de 4 décennies il a fallu, au Venezuela, l'émergence d'une figure charismatique et populiste qui cachait très bien son marxisme-léninisme. Cela fait déjà 25 ans que ça dure.

À la différence des cubains, les vénézuéliens se sont bravement soulevés contre cette dictature populiste, mais la répression féroce a eu gain de cause.

[alea-jacta-est]

Il y a une logique perverse qu'appliquent les populistes. Ils affirment
1. Le peuple ne peut pas se tromper.( ce qui est un postulat démagogique assez stupide repris, entre autres, par Mélenchon...).
2 Je suis élu donc je suis une incarnation de la volonté du peuple.
3 . Tout adversaire politique devient de facto un ennemi du peuple...un traître.
C'est simpliste mais c'est comme ça que le populisme fonctionne depuis au moins Robespierre.
En ce qui concerne le Vénézuela il ne faut pas oublier que les tous puissants Etats-Unis leur livrent une terrible guerre économique à travers de dures sanctions, ce qui n'arrange rien...

[rosemar]

Merci pour ce partage et ce conseil de lecture : le populisme gagne du terrain, il est bon d'en connaître tous les ressorts. Voici un résumé en images du livre :

https://www.tf1info.fr/politique/video-nous-avons-lu-pour-vous-le-siecle-du-populisme-de-pierre-rosanvallon-2143380.html


Belle soirée, AJE

[alea-jacta-est]

Merci beaucoup pour cet excellent résumé de TF1. Je n'ai pas grand-chose à ajouter si ce n'est que le livre est vraiment instructif. Un seul exemple: Rosanvallon nous parle d'un idéologue colombien Jorge Gaitan dont je ne savais absolument rien, un responsable politique qui a inspiré de nombreux dirigeants en Amérique latine et ailleurs aussi.
L'essai est bien évidemment excellemment écrit. Rosanvallon n'est pas professeur au collège de France par hasard. Oui, il y a du niveau dans ce livre, du niveau, de la rigueur et de la profondeur.
Et puis, je l'ai dévoré si rapidement que je me rends compte que je suis allé trop vite et il va falloir que je relise certains chapitres une 2 ème fois pour bien en extraire la substantifique moelle.
Bonne fin de soirée l'amie