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15 juillet 2022 5 15 /07 /juillet /2022 07:03

Bonjour les amis,

Je viens de terminer la lecture du livre dont tout le monde parle, GUERRE, un manuscrit de Louis-Ferdinand Céline retrouvé dans des conditions un peu invraisemblables.

GUERRE de Louis-Ferdinand Céline

Résumé

Parmi les manuscrits de Louis-Ferdinand Céline récemment retrouvés figurait une liasse de deux cent cinquante feuillets révélant un roman dont l’action se situe dans les Flandres durant la Grande Guerre. Avec la transcription de ce manuscrit de premier jet, écrit quelque deux ans après la parution de Voyage au bout de la nuit (1932), une pièce capitale de l’œuvre de l’écrivain est mise au jour. Car Céline, entre récit autobiographique et œuvre d’imagination, y lève le voile sur l’expérience centrale de son existence : le traumatisme physique et moral du front, dans l’« abattoir international en folie ». On y suit la convalescence du brigadier Ferdinand depuis le moment où, gravement blessé, il reprend conscience sur le champ de bataille jusqu’à son départ pour Londres. À l’hôpital de Peurdu-sur-la-lys, objet de toutes les attentions d’une infirmière entreprenante, Ferdinand, s’étant lié d’amitié au souteneur Bébert, trompe la mort et s’affranchit du destin qui lui était jusqu’alors promis. Ce temps brutal de la désillusion et de la prise de conscience, que l’auteur n’avait jamais abordé sous la forme d’un récit littéraire autonome, apparaît ici dans sa lumière la plus crue. Vingt ans après 14, le passé, « toujours saoul d'oubli », prend des « petites mélodies en route qu'on lui demandait pas ». Mais il reste vivant, à jamais inoubliable, et Guerre en témoigne tout autant que la suite de l'œuvre de Céline.

GUERRE de Louis-Ferdinand Céline

Le point de départ du roman est un fait réel puisqu'il s'agit de la grave blessure dont a été victime Céline et qui lui a laissée toute sa vie d'horribles séquelles, et notamment des acouphènes qui torturèrent ses tympans.

Cette blessure infligée donnera lieu dans le livre à des descriptions très pénibles et très crues, aujourd'hui on dirait "gore".

Céline sait nous plonger en quelques lignes dans l'horreur de 14, au milieu des gémissements d'une chambre collective de gueules cassées. 

Son écriture est crue, rageuse, évitant tout pathos.

Pour Céline cette blessure est l'occasion de liquider toute dette envers la société, une société qu'il vomit à chaque page.

Ce qui frappe c'est l'incompréhension fondamentale entre le personnage Ferdinand (vrai anti-héros) et ses contemporains. 

Ferdinand garde pour lui (et pour le lecteur) ce qu'il pense réellement des événements qu'il traverse car s'il le faisait publiquement il risquerait le peloton d'éxécution. Son hypocrisie est ici une question de survie !

A l'hôpital de campagne où il est soigné Céline nous présente toute une galerie de personnages qui sont tous un peu jobards, un peu bizarres, un peu décalés, et pour qui la guerre sera l'occasion de laisser libre cours à leurs penchants les plus triviaux et vulgaires.

Les dialogues sont souvent abrupts. On est loin du politiquement correct actuel. Les hommes sont d'affreux phallocrates. Les femmes présentées souvent comme de la "chair à bites" savent exercer un réel pouvoir sur des hommes incapables de résister à leurs instincts libidineux. C'est du "Basic instinct" chez Rabelais, au milieu des râles et de la souffrance.

Là, il y va fort Céline ! Comme d'habitude chez lui, tout le monde en prend pour son grade.

Il emploie souvent l'argot de son époque (que je connaissais déjà un peu) mais j'ai eu plus de mal à saisir le sens de certains dialogues que lors de la lecture du VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT. Il m'est même parfois arrivé de consulter le lexique qui est à la fin du livre pour essayer de bien piger ce que l'auteur voulait dire.

GUERRE est un récit assez court et moins abouti que le VOYAGE mais il offre un magnifique contrepoint à tous les fans de Céline.

Plus de 60 ans après sa mort, celui-ci nous revient de manière tout à fait inattendue, comme si il nous faisait un petit coucou d'outre-tombe, comme s'il nous crachait une dernière fois à la figure:

" Vous pouvez penser de moi ce que vous voulez, je vous emmerde, tas de nulos! ".

NB: Si vous désirez en savoir plus voici le lien Babélio avec des critiques très pertinentes et des extraits du roman

https://www.babelio.com/livres/Celine-Guerre/1400401

 

 

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commentaires

L
sa haine de l'humain n'a d'égal que sont talent !
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A
J'aime bien votre formule pour le définir. Effectivement il y a beaucoup de ça chez Céline.<br /> <br />
C
Merci de m’avoir fait découvrir l’affaire du vol de ces inédits de Céline que j’ignorais. Le roman de ces manuscrits reste à écrire : il semble que leur receleur ait négocié son impunité judiciaire et la discrétion des médias lors de leur restitution .Avons-nous affaire à un détraqué du genre de Morris Bellamy, imaginé par Stephen King dans « Carnet noir », qui s'est délecté pendant des décennies du plaisir pervers d’avoir accaparé pour sa seule lecture l’œuvre du grand écrivain qu’il ne sera jamais ?
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A
Bien vu la référence à CARNETS NOIRS de Stephen KING que j'ai lu ( et adoré) il y a quelques années. C'est vrai qu'il y a un roman qui reste à écrire autour de ces romans. GUERRE vient compléter très naturellement LE VOYAGE. C'est une histoire en marge du voyage mais avec le personnage principal que l'on connaissait déjà...Et pour le lecteur c'est quand même une étrange sensation que Céline vienne nous revisiter à 90 ans intervalle. Pas de doute c'est bien lui, avec son style inimitable !Je dirais même qu'il est un peu plus cru que dans LE VOYAGE...
M
Je ne crois pas avoir lu grand chose de Céline et si oui, il y a très longtemps.<br /> Ce qui me retient, c'est son antisémitisme forcené...<br /> Bonne soirée,<br /> Mo
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A
Si ça fait très longtemps que tu ne l'as pas lu, je te conseille de redémarrer avec LE VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT....avant d'aborder le reste...
M
Bon, je vais lire les romans que tu cites.<br /> Merci de ta longue réponse.<br /> Bon après-midi à l'ombre... ;-)<br /> Mo
A
Son antisémitisme ( pour lequel i a été condamné à l'indignité nationale) n'apparaît pas dans GUERRE, ni dans le Voyage, ni dans MORT A CREDIT.<br /> Céline est incontournable à plus d'un titre. Il était de par son caractère une espèce à part d'anarchiste de droite.<br /> LE VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT est la première grande création littéraire où apparaît le thème de l'anti-héros. Céline est le premier à créer cet archétype et il a plus de 50 ans d'avance sur son temps...on ne peut pas lui retirer ça.<br /> Toujours dans LE VOYAGE Céline s'attaque aux grandes tares de son époque: le patriotisme nationaliste, le bellicisme guerrier barbare et absurde, le colonialisme, le racisme, le machinisme et l'aliénation de l'homme par le travail... Rien que ça !!!<br /> En fait on peut parler de personnages céliniens, ça a du sens. Je te donne un exemple.<br /> Quand Tavernier adapte le roman de Jim Thompson ( 1280 âmes) pour faire le film COUP DE TORCHON il réécrit les personnages et les installe en Afrique coloniale française. En fait les personnages, Noiret, Guy Marchand, Eddy Mitchel, Stéphane Audrand, JP Marielle sont tous très céliniens.<br /> En fait, Tavernier a dû être très influencé par Céline, à mon avis...et peut-être même , sans qu'il ne s'en rende compte...
R
Céline, l'écrivain de l'horreur de la guerre : il montre l'ignominie de la guerre, dans un style fort, parlé, très original. Dans le Voyage au bout de la nuit, Céline use aussi d'un certain humour grinçant... je ne sais pas si on retrouve cet humour dans Guerre ?<br /> Un livre à lire ! <br /> <br /> <br /> Belle soirée, AJE
Répondre
A
Oui, on retrouve bien son humour grinçant avec ces personnages qui l'entourent à l'hôpital. Il y a par exemple une réception qui est donnée en l' honneur de Ferdinand où apparaissent ses parents, Bébert son ami souteneur, Angèle la prostituée, Mlle Lespinasse une infirmière très spéciale, le docteur Méconille un peu zinzin, etc... et les personnages ne se situent pas très bien entre eux, ce qui donne des dialogues et des situations assez cocasses (seul Ferdinand est celui qui comprend tout...).<br /> Certaines descriptions sont assez savoureuses comme, par exemple, la manière de marcher d'Angèle au milieu des soldats anglais, sa façon de rouler des fesses avec un art consommé, en feignant de ne pas se rendre compte de l'effet qu'elle produit sur les troupes...<br /> Oui, on rit avec jubilation et puis l'horreur de la guerre fait irruption, notamment avec un dénouement assez tragique pour Bébel...Là, aussi, Ferdinand ne fait pas preuve d'une éthique irréprochable vis-à-vis de son ami et ça perturbe le lecteur. Dans ce monde-là plus aucune valeur ne résiste...<br /> Je ne sais pas si c'est un livre à lire, mais ceux qui ont adoré LE VOYAGE AU BOUT DE LA NUIT vont accrocher à GUERRE...<br /> Bonne fin de soirée l'amie
L
Dis-moi... ces manuscrits trouvés sont souvent inachevés... Celui-ci semble-t-il fini ?
Répondre
A
GUERRE fait partie d'une série de textes qui ont été dérobés à Céline avant qu'il n'ait eu le temps de les parachever et de les soumettre à son éditeur. Certains passages ou certains mots du manuscrit sont restés illisibles mais on peut considérer qu'on possède le contenu de l'oeuvre définitive car il n'y a pas de trous dans le récit...On y retrouve bien l'esprit décapant de celui qui a revolutionné les lettres françaises...GUERRE devient maintenant indispensable à tout lecteur féru de Céline.