Bonjour les amis,
Je viens de lire un roman fantastique de Guillaume Musso intitulé L' INSTANT PRÉSENT.
Le personnage principal du livre y est victime d' une malédiction pendant 24 ans: il ne vit qu'une journée par an. A chaque fois, il disparaît dans le néant pour réapparaître l'année suivante pendant 24 heures.Je vous laisse imaginer les difficultés que cette situation peut engendrer dans l' entourage proche et affectif du protagoniste.
Pendant que je lisais ce roman divertissant et sans prétentions, je me rendais compte que la situation du héros était une très belle métaphore de ce que vivent les gens qui, comme moi, se sont expatriés à un âge assez tardif.
En effet, nous ne voyons plus les personnes qui ont fait partie pendant plusieurs decennies notre quotidien qu' une ou deux journées tous les un, deux ou trois ans...ou plus...Le temps se dilate...joue à saute-moutons...s' accélère à coups d' instantanés...
Par exemple, on apprend que certaines personnes sont décédées avant même d' avoir su qu' elles étaient malades.C' est une sensation étrange et troublante.Comme si la vie défilait en accéléré...
Je ne prendrai qu' un seul exemple.
Il y a 15 ou 20 ans, j' avais croisé une connaissance à une terrasse de café à Valenciennes.On l' appelait Raspoutine à cause de son physique imposant de grand barbu aux cheveux longs et sa ressemblance avec le fameux personnage historique russe.Je n' ai jamais connu son vrai nom car on l' appelait toujours Raspoutine, ou de façon abrégée Raspoute...
Quelques jours avant de croiser Raspoute à la terrasse du café, ma soeur m' avait informé qu' il avait perdu sa compagne, et qu' il était donc veuf à l' âge de 35-40 ans,et avec la responsabilité et la charge de ses deux jeunes filles.
J' entamais donc la conversation avec mon ami en lui présentant avec beaucoup de retard mes sincères condoléances, puis je lui demandais la nature de la maladie qui avait emporté sa femme ( vu que moi,pendant ce temps-là, j' étais à l'étranger et j' ignorais tout de ses problèmes).
Et Raspoute qui n' avait pas très envie d' aborder le sujet , m' explique la mort de sa femme de manière très brève, en me disant avec un sourire tristement ironique:
" Bin tu vois...un jour t' es là...et puis, un jour, t' es plus là...".
Bien évidemment, sentant que mon ami n' avait pas envie de s' étendre plus longuement sur le sujet, je changeais rapidement de thème et je passais le reste de la conversation à parler avec lui de notre actualité réciproque,de boulot,des enfants, de musique, de science-fiction et de tout ce que nous aimons dans la vie.
Raspoute était un grand fan de musique contemporaine, de jazz-rock et de SF aussi...
Il y a quelques semaines, une personne de mon entourage m' a appris qu' elle revenait de l' enterrement de Raspoute qui avait été à son tour victime d' une longue et cruelle maladie 20 ans après le décès de sa compagne.Encore une fois, la nouvelle m' a surpris,attristé, et je n' ai pu m' empêcher de repenser à ma dernière conversation avec lui, avec notamment cette phrase qui résonnait étrangement maintenant.
" Tu vois...Un jour t' es là...et puis un jour t' es plus là...."
Comme si nous étions tous comme des bulles de savon qui disparaissent brutalement de l' univers, une par une , pendant que d' autres bulles naissent, apparaissent avant de disparaître à leur tour de manière aléatoire.
Quand on vit loin de sa terre natale,la réalité et le temps y prennent un autre dimension et s' écoulent d' une autre manière...un peu comme dans le roman de MUSSO...un jour par an...et, entre ces deux journées, il s' est passé parfois toute une vie...
PS: voici un lien sur le livre de Musso.C' est pas son meilleur bouquin mais il se laisse lire très rapidement...et puis la fin réserve une belle et étonnante surprise...